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Référentiel géographique : un sujet débattu – Épisode 2 : Nouvelles références

| 23 avril 2018

Catégorie: Cartographie, Données, Environnement, IDG/IDS, Imagerie, Institutions, Open Data, Reportages, Satellite/Spatial, Utilisateurs, WebMapping

Épisode 2 : Nouvelles références

1 312 mots, environ 6 minutes de lecture

La journée professionnelle annuelle organisée par OPenIG en avril 2018 s’est intéressée à la question des référentiels. Après avoir exploré la notion de référence (voir notre article ici), les débats ont passé en revue quelques nouveaux référentiels, les enjeux qu’ils posent et imaginé le futur.

L’IGN, la Direction générale des finances publiques (DGFIP) et les géomètres apparaissent comme les producteurs naturels des grands référentiels géographiques nationaux, l’un étant officiellement en charge de la description physique du territoire et les autres de la définition de la propriété, exprimée par le cadastre. Mais aujourd’hui, ils ne sont plus seuls et le seront encore moins dans l’avenir.

Aujourd’hui, des orthophotographies à très haute résolution servent de référentiel et permettent de saisir toutes sortes de données (PCRS, luminaires, arbres…) (document CRAIG)

Aujourd’hui, des orthophotographies à très haute résolution servent de référentiel et permettent de saisir toutes sortes de données (PCRS, luminaires, arbres…) (document CRAIG)

Des collectivités de plus en plus impliquées

Face au besoin d’une description très détaillée de l’espace, les collectivités locales produisent leurs propres référentiels. La situation n’est pas nouvelle comme en témoignent les nombreuses productions d’orthophotographies, de bases de données topographiques ou de socles 3D. Même si ces bases n’ont pas de caractère d’universalité ou d’équité territoriale à l’échelle nationale, elles n’en constituent pas moins des référentiels et servent de base à d’autres couches géographiques. Ainsi, grâce aux évolutions des outils SIG, il est devenu de plus en plus facile d’utiliser des orthophotographies très haute résolution pour saisir des données métiers.

L’occupation du sol : une situation qui évolue

La frontière entre donnée métier et référentiel n’est pas figée. Les bases de données d’occupation du sol haute résolution, par exemple, produites par les infrastructures de données géographiques et les collectivités semblent changer aujourd’hui de statut. Elles sont devenues une source incontournable pour suivre la consommation foncière, quantifier les SCOT et observer les territoires grâce aux indicateurs qu’elles permettent de produire.

Complémentaires des autres couches de données classiques des SIG, les bases de données d’occupation du sol locales ont acquis le statut de « référentiel territorial » pour Claire Ajouc du CRIGE PACA.

Complémentaires des autres couches de données classiques des SIG, les bases de données d’occupation du sol locales ont acquis le statut de « référentiel territorial » pour Claire Ajouc du CRIGE PACA.

Et c’est bien parce qu’elles deviennent des référentiels que l’IGN a commencé à s’y intéresser. N’est ce pas son rôle de garantir l’uniformité des méthodes de calcul d’indicateurs sur tout le pays, permettant les comparaisons entre territoires et la publication de chiffres globaux ? Mais sans moyens financiers pour assurer une nouvelle production et face à un héritage hétérogène de sources, de méthodes de production et de nomenclatures… l’IGN se retrouve dans une situation complexe. Les IDG et collectivités qui produisent déjà depuis plusieurs années des bases selon des nomenclatures généralement inspirées de Corine Land Cover (une référence incontournable !), ne veulent pas s’engager dans une coproduction avec l’IGN sans garantie de continuité de leurs propres indicateurs.

Des référentiels coproduits

Aujourd’hui, plusieurs projets s’appuient directement sur les collectivités pour produire de nouveaux référentiels nationaux. C’est par exemple le cas pour le Plan de Corps de Rue Simplifié (PCRS). Inscrit dans la Loi, il bénéficie bien d’un statut officiel, accompagné d’obligations en termes de modalités de production. Pour le construire, les collectivités, les gestionnaires de réseaux, les géomètres… ont dû se mettre d’accord sur un standard, entériné par une structure qui fait elle-même référence, le conseil national de l’information géographique (CNIG), puisque l’État y participe. Sa production décentralisée confiée aux collectivités et aux gestionnaires de réseaux garantit également qu’il est reconnu par plusieurs organismes. Sa nature même en fait un socle pour « caler » d’autres données : les réseaux enterrés, mais également d’autres données métier comme en témoignent les usages présentés lors de la journée OPenIG. Ainsi, même si sa production s’appuie sur différentes techniques (photogrammétrie, levés de terrain, acquisition massive de données vidéo…), il s’agit bien d’un référentiel géographique.

Un référentiel est toujours le fruit d’une négociation entre ceux qui vont le produire et l’utiliser. Le développement des coproductions à l’échelle régionale ou locale remet cette étape à l’honneur. (Document CRAIG sur la constitution du PCRS)

Un référentiel est toujours le fruit d’une négociation entre ceux qui vont le produire et l’utiliser. Le développement des coproductions à l’échelle régionale ou locale remet cette étape à l’honneur. (Document CRAIG sur la constitution du PCRS)

Le même raisonnement peut-il s’appliquer au Géoportail de l’urbanisme en cours de construction ? Là encore, le dispositif de sa création est inscrit dans la loi et il s’accompagne d’un standard, afin de garantir la cohérence des plans locaux d’urbanisme, servitudes d’utilité publiques et autres documents versés par les collectivités. Ces couches de données peuvent être vues comme de simples données métiers, puisqu’elles s’appuient elles-mêmes sur des référentiels reconnus (RGE, cadastre). Mais leur diffusion via une plateforme unique, va permettre le développement de services variés, publics et privés, qui utiliseront le GPU comme base : Smart PLU, UrbanSimul, @ctes, demandes d’autorisation d’urbanisme assistées, Géorisques, Decodurba… Cette liste non exhaustive montre qu’une donnée thématique (urbanisme) peut à son tour devenir une référence par la multiplicité de ses usages. Par son inscription dans le temps, par la légitimité de la plateforme technique, par l’homogénéité qu’apporte le standard… les documents d’urbanisme version GPU semblent bien partis pour devenir, à leur tour, des référentiels.

Autres sources

Établissements publics et autorités locales ne sont plus les seuls à produire des données géographiques, loin de là. Même les « néophytes » s’y mettent comme dans OpenStreetMap, le projet le plus abouti de production collaborative. Mais peut-on considérer OSM comme un référentiel ? La légitimité du producteur « autorisé », est ici remplacée par la large mobilisation des contributeurs, la surveillance de la qualité par les pairs, l’ouverture des données et des modèles, le tout s’appuyant sur des outils techniques bien maîtrisés. « Oui, insiste Jean-Yves Garinet, contributeur et architecte en système d’information chez Magellium. OSM commence à être reconnu comme un référentiel sur certaines thématiques telles que l’accessibilité, ou la cyclabilité comme le montre son utilisation par la SNCF et le STIF. » Des collectivités utilisent désormais OSM comme référentiel pour la saisie de toutes sortes de points d’intérêt. Car ce qui fait finalement un référentiel, c’est l’usage massif qui en est fait.

Certaines des données produites par des opérateurs privés peuvent-elles être considérées comme des référentiels ? Google Maps n’est-il pas devenu une référence incontournable ? Par sa large diffusion, par son format facile à exploiter par les développeurs, c’est sans doute le cas. Mais l’absence d’homogénéité, la non-maîtrise des caractéristiques permettant d’en évaluer la qualité (et donc la base de la référence) limitent son usage de référentiel dans la sphère publique. D’autres images satellitaires semblent pourtant acquérir progressivement ce statut, comme les couvertures nationales SPOT (SPOT 5 puis 6 et 7) diffusées chaque année gratuitement par Géosud dans la sphère publique. Car ici, le travail de cohérence, d’harmonisation et de mise en ligne est assuré par une équipe bénéficiant d’une véritable légitimité (équipes scientifiques de l’Equipex Geosud et de Theia ainsi qu’IGN Espace).

Les images satellitaires : des données de plus en plus intégrées dans la chaine de production de toutes sortes de données (occupation du sol par exemple). Chaque image acquise dans la cadre de la couverture SPOT 6-7 de 2014 diffusée par Geosud a été téléchargée en moyenne 17 fois.

Les images satellitaires : des données de plus en plus intégrées dans la chaine de production de toutes sortes de données (occupation du sol par exemple). Chaque image acquise dans la cadre de la couverture SPOT 6-7 de 2014 diffusée par Geosud a été téléchargée en moyenne 17 fois.

Demain, d’autres données privées vont-elles s’imposer comme référentiels géographiques aux acteurs de l’aménagement du territoire ? La multiplication des capteurs connectés et des données générées par les téléphones portables (Waze, HERE…) fera-t-elle émerger de nouveaux référentiels ? La loi pour la République numérique et les recommandations du rapport Villani semblent ouvrir la porte en mentionnant explicitement la diffusion obligatoire de certaines données massives acquises par des acteurs privés, afin de mieux comprendre et de gérer plus finement les territoires, de participer au développement de l’intelligence artificielle.

 

« I had a dream »

Par petites équipes, les participants de la journée ont été invités à s’exprimer et à placer sur une frise chronologique leurs référentiels de rêve. Ils n’ont pas manqué d’idées qui illustrent parfaitement les enjeux actuels et futurs. Certains sont manifestement plus optimistes que d’autres !

2019-2020 : Un référentiel parcellaire unifié (RPCU), en 3D, avec une composante forestière. Certains pensent qu’il ne sera disponible sur tout le territoire, libre et équitable qu’en 2025.
2020 : Le RGE sera intégralement accessible sous forme de flux
2021-2022 : Un référentiel à très grande échelle (3 cm)
2021-2022 : Une couverture orthophotographique à 5 cm de résolution tous les ans sur tout le territoire
2027 : Un référentiel immersif en 3D, représentant également le sous-sol à 1 cm de résolution.
2027 : Une orthophotographie à 1 cm de résolution gratuite (disponible en temps réel, avec vectorisation simultané et certifiée)
2027 : Des référentiels pédologiques (deux propriétés du sol sur 2 m de profondeur, tous les 90 m)
2028 : Interconnexion des données de tous les capteurs terrestres et aériens.
2030 : « Nous disposerons d’un référentiel démocratique mondial pour évaluer les systèmes politiques de tous les pays et attribuer des droits (à l’ONU) en fonction de l’évaluation du pays. »
2030 : Référentiel cadastral 4D à 10 cm

 

À lire également : Référentiels géographiques : un sujet débattu. Épisode 1 : Aux sources de la référence

Présentations de la journée sur le site d’OPenIG

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