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Tracking or not tracking ? That is the question : Et le consentement ?

Catégorie: A l'actu, Cartographie, Données, Grand public, Matériel/GPS, Mobilité

Comment suivre, voire prédire l’évolution de la pandémie de la Covid-19 tant au niveau collectif qu’individuel ? Cette question éminemment géographique met sur le devant de la scène l’utilisation de diverses données, notamment nos traces numériques géolocalisées via nos téléphones portables. Nous avons demandé à divers spécialistes de nous donner leur point de vue afin d’éclairer un débat complexe.

Covid19 trackingLe point de vue du « béotien » sur la question du consentement par Marc Bernard

Le 24 février le gouvernement de la province chinoise du Zhejiang annonce que plus de 90 % de la population a téléchargé et renseigné l’application qui délivre le QR code sanitaire, sésame individuel indispensable pour se déplacer par temps d’épidémie. Les autorités vérifient en de nombreux points de passage que le QR des personnes en déplacement est bien vert, et ceux qui ne l’ont pas, ou qui ont reçu un QR orange ou rouge sont priés de rester chez eux en quarantaine, sans connaître les raisons de la décision qui les frappe, puisque l’algorithme n’est pas public. De plus, le QR code est parfois scanné au passage et, selon le N.Y Times (1), envoyé aux autorités, qui peuvent ainsi suivre les déplacements de chacun.

En Europe, les données recueillies sur internet sont « anonymisées et agrégées », comme le veut la loi, et chaque application demande notre consentement. « Anonymisées et agrégées, pense-t-on, alors on peut y aller ! ». Eh bien non !

C’est un jeu d’enfant que de remonter à l’identité réelle de la personne : des scientifiques l’ont démontré en publiant une méthode (2) qui s’appuie sur les données disponibles aux USA et qui s’avère capable d’identifier 99,98 % des Américains à partir d’informations élémentaires comme le sexe, la date de naissance, le code postal, etc.

Le traçage de la population est à l’étude en France pour endiguer l’épidémie. Le Premier Ministre a reconnu qu’un tel dispositif « ne serait pas légalement permis » ici mais n’a pas exclu de le déployer « sur le fondement d’un engagement volontaire ». Personne en Europe ne voudrait du système autoritaire chinois, pensez-vous. Pourtant, les 50 millions d’utilisateurs du Zhejiang étaient tous volontaires.

Arrêtons-nous sur la notion de consentement. Certes, les Européens consentent chaque jour à livrer leurs données, agrégées ou non, anonymisées ou non — la différence n’est pas bien grande, on l’a vu. Ils pourraient donc consentir en masse à l’avenir à des applications de traçage anti-coronavirus. Mais quelle est la nature de ce consentement ? Est-il réellement « libre et éclairé » comme le requiert le RGPD ?

Quelle est la nature du consentement de l’adolescent qu’un refus priverait de rejoindre le réseau social en vogue ? Le consentement de l’exécutant qui accepte les heures supplémentaires proposées par l’entreprise manifeste-t-il toujours un libre volontariat ? Et si un citoyen européen donne un jour son consentement à une application de traçage, alors qu’un refus l’exposerait à la poursuite peut-être indéfinie de son confinement, s’agirait-il d’un acte de pleine liberté ou bien d’une simple acceptation passive, « soumission à une volonté supérieure, résignation au destin » (3) ?

Où s’arrêtent la contrainte et le rapport de force, où débute le consentement libre et éclairé du citoyen ? Il nous manque un philosophe pour en débattre.


(1) https://www.nytimes.com/2020/03/01/business/china-coronavirus-surveillance.html

(2) https://www.nature.com/articles/s41467-019-10933-3

(3) https://www.cnrtl.fr/definition/acceptation

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