La ville à toute heure
Catégorie: Cartographie, Données, Mobilité, Recherche, Reportages, Secteur public
Lors du dernier colloque SAGEO qui s’est tenu fin novembre 2014, une équipe de chercheurs des laboratoires PACTE de Grenoble et LIVE de Strasbourg ont présenté une méthode pour mieux comprendre la distribution spatio-temporelle des « aménités » urbaines. Une autre vision du « pouls » de la ville.
Intelligente, durable, équitable, attractive, équilibrée… la ville doit désormais se parer de toutes les vertus. Au cœur de ces problématiques, se trouve la question de l’accessibilité à un certain nombre de ressources : services publics, commerces, établissements sportifs, banques… Mais la seule analyse de leur répartition spatiale n’est plus suffisante car la ville se consomme désormais à toute heure, comme l’a bien analysé le géographe Luc Gwiazdzinski.
De l’espace
Première étape, géoréférencer l’ensemble des commerces, services administratifs, établissements dédiés à la santé, à l’enseignement, équipements sportifs, culturels et de loisirs ainsi que certaines entreprises. La BD Topo ne catégorise pas assez finement les bâtiments, tandis que la base permanente des équipements de l’INSEE ne donne que des nombres d’équipements et services à l’Iris. Après avoir comparé OpenStreetMap et une base commercialisée par la chambre de commerce et d’industrie (CCI), l’équipe a opté pour cette deuxième solution car « la base CCI contenait 6 650 commerces contre 3 700 dans OSM » et contenait plus d’attributs (SIRET, APE…). Au final, ce sont plus de 14 000 équipements qui ont été géocodés en utilisant à la fois la BD Adresses et Google Maps, ainsi que les outils de MapInfo et ArcGIS. Si 97% des adresses ont été géocodées, ce taux n’est pas uniformément réparti sur le territoire. Les résultats se dégradent fortement sur les communes les plus excentrées de la métropole.
Du temps
Deuxième étape, les horaires d’ouverture et de fermeture. La méthode proposée s’appuie sur une enquête téléphonique. Les chercheurs auraient bien utilisé une méthode plus directe (récupération des horaires en ligne, open data), mais sur les 26 communes de l’agglomération grenobloise, aucune base exhaustive n’était mobilisable. Par ailleurs l’équipe n’a pas souhaité prendre le risque d’aspirer une partie des données depuis les nombreux sites Internet (comme « les-horaires.fr ») qui n’autorisent officiellement que les consultations et s’appuient sur des méthodes de collecte non homogènes.
L’enquête, exhaustive pour les services publics (Internet et téléphone), s’est effectuée par sondage pour les commerces et entreprises. Ces derniers ont été répartis en sous-populations, liées à la densité de commerces au kilomètre carré et au type d’activité (commerces de gros ou de détail, activités financières et d’assurance, immobilières…) soit 25 catégories de commerce au total. La densité a été calculée sur les zones origine-destination des enquêtes ménages déplacements, partant de l’hypothèse qu’elles définissent des espaces homogènes en matière de pratiques quotidiennes. À l’intérieur de chaque strate, un échantillon aléatoire a été défini. Cinq enquêteurs ont été mobilisés, qui ont collecté les informations sur 1 022 commerces et 636 entreprises. La généralisation a été effectuée en prenant en compte les types d’entités et les zones de densité.
Des cartes
Pour explorer ces données, les chercheurs ont choisi de se focaliser sur la densité d’équipements ouverts selon un pas de temps de 5 minutes. Ils ont développé une interface d’exploration qui combine carte de chaleur (heatmap), et visualisation graphique des densités. Les équipements peuvent être étudiés par catégories pour un jour donné. Le rayon de recherche pour le calcul de la densité d’équipement est également paramétrable. Animation et comparaisons multiples sont alors possibles.
En lui-même, ce type d’analyse ne révèle pas de phénomènes très surprenants, même s’il rend bien visibles les rythmes quotidiens différenciés entre la ville et sa banlieue. Il peut être intéressant à mettre en relation avec d’autres analyses sur les déplacements. Encore du travail en perspective !
- Distribution spatiotemporelle des équipements urbains de l’agglomération grenobloise par Isabelle André-Poyaud, Élise Beck, Sonia Chardonnel, Alexis Conesa, Fabien Del Olmo et Thomas Leysens. Pour accéder directement à l’article, suivez ce lien