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Les quatre piliers de Planet

| 29 septembre 2017

Catégorie: Données, Entreprises, Environnement, Géomarketing, Imagerie, Open Data, Reportages, Satellite/Spatial, Sécurité/défense, Services

(1083 mots – temps de lecture estimé : 5 mn)

Fondé en 2010, financé, entre autres, par Peter Thiel, Planet fait partie de cette nouvelle génération d’acteurs de l’observation spatiale (« new space »), qui bouscule les codes de l’industrie. Désormais à la tête de trois constellations, l’entreprise mise à fond sur les services d’analyse. Rencontre lors d’Intergeo avec Marcus Apel, responsable grands comptes pour le bureau de Berlin.

Rencontre lors d’Intergeo avec Marcus Apel, responsable grands comptes pour le bureau de Berlin.

Rencontre lors d’Intergeo avec Marcus Apel, responsable grands comptes pour le bureau de Berlin.

Les lapins de l’espace auraient-ils gagné leur pari ? S’ils ont depuis longtemps renoncé à offrir leurs données à la terre entière, ils ont bel et bien envahi l’espace avec leurs petits satellites pas chers.

From Dove with love

Premier pilier de l’entreprise, à l’origine même de sa création, la constellation de microsatellites Dove (Colombe en anglais) de la taille d’une boîte à chaussures (ci-dessus, une maquette à l’échelle 1/1 présentée à Intergeo). Malgré quelques loupés, 148 sont opérationnels et une dizaine d’autres devraient être lancés dans les prochaines semaines.

La résolution des images acquises en RVB et proche infrarouge varie entre 3,7 et 3,9 mètres. Pourquoi de telles variations ? Tout d’abord les satellites sont répartis sur trois orbites légèrement différentes autour de 400 km. De plus, ces microsatellites n’ont aucun système de propulsion. Seuls quelques rouages intérieurs et beaucoup d’électronique pour réorienter les ailes qui portent les panneaux solaires permettent de les réorienter. Planet en est à la treizième génération depuis les premiers lancements en février 2014. Mémoire, système électronique, star tracker (viseur d’étoiles), tout a changé en trois ans. Mais la prochaine génération de caméra doublera quasiment le nombre de pixels, aujourd’hui à 29 millions. « Nous procédons toujours de la même façon. Nous commençons par en lancer un ou deux, nous les testons en orbite. Si l’essai est concluant, nous lançons la fabrication » explique Marcus Appel.

Le deuxième pilier de l’entreprise, et le plus rentable jusqu’à aujourd’hui, est la constellation RapidEye (BlackBridge), rachetée en 2015. Les images à 5 mètres de résolution sont bien connues dans le secteur agricole grâce au canal red-edge en plus du proche infrarouge et du RVB classiques.

Une nouvelle mariée loin d’être parfaite

Planet est également à la tête d’une troisième constellation, celle de Terra Bella, rachetée à Alphabet (la maison mère de Google) en début d’année. Sept satellites SkySats sont actuellement actuellement en orbite. Avec une résolution de 2 mètres en multispectral (RVB et proche infrarouge) et une résolution de 70 cm en panchromatique, ils savent en outre acquérir des vidéos. Six nouveaux satellites seront lancés d’ici deux semaines, mais le produit n’est pas encore pleinement commercial. « La constellation servait uniquement à alimenter Google pour ses produits cartographiques (Google Earth et Google Maps), il n’y avait aucune activité commerciale. Du coup, nous sommes en train d’évaluer le système et de la faire évoluer pour pouvoir commercialiser les images. Cela demande du travail d’amélioration de la qualité des images, de re-calibration, de développement du système de programmation » détaille Marcus Appel. Quant aux capacités vidéos du système largement mises en avant par Google à l’époque pour proposer de nouveaux services (voir Google et les big géodata : ce qui va arriver), elles doivent encore trouver leur marché. De plus, chaque satellite peut en fait acquérir une vidéo de 90 secondes sur un lieu donné au maximum une fois par jour.

Des opérations simplifiées

Il y a désormais environ cinq cents personnes qui travaillent à Planet dans plusieurs centres d’opération : Moutain View pour SkySat, Berlin pour RapidEye, San Francisco pour les Dove, mais aussi Washington (applications défense), Seattle (développeurs), Lethbridge (produits à valeur ajoutée pour le gouvernement canadien), Amsterdam. Mais Berlin tend à devenir le principal centre de contrôle pour l’ensemble des satellites. Il y a un réseau d’une trentaine d’antennes pour les Dove, dont certaines sont en cours de mise à jour pour intégrer également les données Skysat. RapidEye, lui, a son propre réseau d’antennes. « Les données acquises par les Dove sont automatiquement traitées dans le Cloud de Google. Nous sommes en train de mettre en place la même chose pour RapidEye », se réjouit Marcus Appel. Bientôt, finis les segments sols traditionnels, tout sera automatisé.

Vers l’économie de la connaissance

« Ce que nous vendons, c’est l’accès à une plateforme, insiste Marcus Appel. Dans le cadre d’un projet de surveillance, nous définissons avec le client la zone à couvrir, la temporalité nécessaire, le type de données, la licence (utilisateur unique ou pas, simple visualisation ou téléchargement des données…) ». L’approche séduit et a également permis à l’entreprise de construire rapidement un bon réseau de distributeurs. Elle vient par exemple de remporter un important contrat avec la NGA. D’ailleurs Planet ne se gêne pas pour proposer des données issues d’autres constellations dans sa plateforme : Sentinel (dont les données radar Sentinel-1 d’ici un mois), Landsat et même SPOT (pour le gouvernement canadien).

Jusqu’en 2016, c’était la constellation RapidEye qui générait la majeure partie du chiffre d’affaires, grâce à un modèle économique bien rôdé dans le domaine agricole, mais cette proportion s’est inversée l’an dernier et ce sont désormais les Dove qui ont pris le relais. Avec leur capacité à acquérir des images en chaque point du globe une fois par jour, la proposition reste inégalée.

Comptage de bateau à Botany Bay, Australie

Comptage de bateau à Botany Bay, Australie

Si Planet monnaye l’accès à sa plateforme, elle entend surtout vendre des indicateurs, des comptages, par le biais de ses partenaires ou via ses propres chaînes de traitement. L’évolution de la fréquentation d’un port pour un organisme financier, la surveillance des raffineries d’une région, le comptage des avions… désormais, l’image n’est que le moyen d’accéder à des chiffrages. « Dans les 6 à 8 mois, nous nous orientons résolument vers des approches beaucoup plus statistiques et nous espérons bien proposer des outils applicatifs directement sur notre plateforme, sans avoir besoin de télécharger les données » promet Marius Appel. L’entreprise a mis en œuvre toute une politique pour faciliter le développement de services d’analyse de ses données : accès gratuit (licence CC BY-SA) à des images via Open California, soutien des chercheurs (fourniture de données mais également aide à la publication), contrats d’amorçage pour des start-up qui n’auront plus qu’à verser des royalties si leur projet s’avère payant, etc.

Un navigateur dans l'archive Planet est accessible en ligne. Mais pour télécharger les données sur la Californie, il faut s'identifier.

Un navigateur dans l’archive Planet est accessible en ligne. Mais pour télécharger les données sur la Californie, il faut s’identifier.

On est aujourd’hui bien loin des données gratuites pour tout le monde annoncées en 2010, même si l’explorateur permet à tout un chacun de visualiser l’évolution de la Terre par l’œil de Planet. Quant aux associations humanitaires, elles peuvent désormais accéder gratuitement pendant trente jours à toutes les données acquises sur les zones ayant donné lieu au déclenchement de la charte espace et catastrophes majeures.

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