Déforestation de la forêt amazonienne : Des chiffres, des hommes et des satellites
Catégorie: Cartographie, Données, Environnement, IDG/IDS, Imagerie, Institutions, Reportages, Satellite/Spatial
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Après les querelles sur la mesure des incendies, celle concernant les chiffres réels de la déforestation refait surface. Elle a coûté sa place au directeur de l’INPE, en charge de la surveillance officielle par satellite du phénomène.
Le 8 septembre, l’article tourne en boucle dans toutes les rédactions. « La déforestation de l’Amazonie a presque doublé en un an », titre la dépêche de l’AFP à l’origine de nombreuses reprises médiatiques. Des chiffres précis attestent de l’ampleur des dégâts : 6 404,4 km2 ont été perdus entre janvier et août 2019, contre 3 336,7 km2 à la même période l’an dernier. En août, 1 700,8 km2 (526.5 l’an dernier). « Les experts estiment que le chiffre de 10 000 km2 pourrait être atteint cette année pour la première fois depuis 2008. » Pourquoi un tel emballement ? La pression des forestiers et des éleveurs, encouragés par Président brésilien est clairement montrée du doigt avec des conséquences directes sur les incendies.
Des données officielles
Les chiffres présentés viennent du dernier rapport mensuel de l’institut national de la recherche spatiale brésilienne, l’INPE, et de son système d’alerte DETER qui s’appuie sur des images MODIS quasi quotidiennes à 250 m de résolution (DETER-A), ainsi que sur les images WFI du satellite sino-brésilien CBERS-4 et infrarouge AWiFS (du satellite indien RESOURCESAT-2) autour de 60 m de résolution. DETER vient compléter le système d’observation de la déforestation PRODES, qui fournit des synthèses annuelles à l’aide d’images Landsat (30 m de résolution). PRODES et DETER forment le cœur de l’infrastructure de données spatiales sur la déforestation du Brésil, accessible depuis le site TerraBrasilis. Ce dernier fournit un certain nombre de visualisations (cartes, graphiques), des services OGC (WMS, WFS) et de téléchargement (présentation sous ce lien).
Les méthodologies développées par l’INPE depuis vingt ans, ainsi que l’ouverture de ses données en font une référence. Elles alimentent par exemple Global Forest Watch. Les autres systèmes de surveillance (tels qu’Imazon, basé sur une combinaison de Landsat et Sentinel) fournissent des résultats largement comparables.
Des chiffres fragilisés
Pourtant, Bolsonaro et son ministre de l’environnement sont sceptiques. Au bout d’une querelle larvée qui a duré plusieurs semaines, le directeur de l’INPE a été évincé début août, accusé de fournir des chiffres alarmants, faux, au service des ONG (voir l’article de Sciences et Avenir sous ce lien). Le ministre de l’environnement Ricardo Salles, souhaite refondre le service au prétexte qu’il manque de résolution spatiale et se voit déjà confier l’organisation de la surveillance de la déforestation de l’Amazonie à une entreprise commerciale. Une solution basée sur les satellites Planet est déjà utilisée au Mato Grosso. La note risque d’être salée et la très haute résolution spatiale a toutes les chances de noyer les services sous des données inexploitables à temps pour suivre les activités illégales. Mais c’est peut-être l’objectif…