Cartouche est de retour
Catégorie: Cartographie, Décalagéo, Grand public, Institutions, Utilisateurs
Cartouche, voilà un mot avec un petit air suranné, bien connu des cartographes. Il revient sur le devant de la scène en tant que traduction officielle d’« infobox ».
La commission d’enrichissement de la langue française fait ce qu’elle peut pour ne pas se laisser envahir par les termes anglophones liés aux nouveaux domaines scientifiques et techniques. Elle publie régulièrement au Journal Officiel des termes francisés, que nous sommes tous priés d’utiliser. Sa dernière mouture du 26 septembre aborde des domaines que les géomaticiens connaissent bien : les mégadonnées, la toile profonde, l’Internet clandestin, les graphes de connaissance, les interfaces adaptatives et… les cartouches.
Qui parle encore de cartouches aujourd’hui ? Certes, la question nous préoccupe régulièrement quand il s’agit de refaire le plein de l’imprimante, qui veut sa dose d’encre, et réclame sa cartouche, comme le faisait notre stylo-plume d’antan. Si vous osez encore fumer, vous avez peut-être craqué pour une cartouche de cigarettes lors de votre dernier séjour dans un magasin « duty free ». Les armes à feu, elles, préfèrent aujourd’hui les munitions, terme plus générique. Cartouche garde un côté vieux fusil, et évoque plus l’histoire de France (vous pouvez visiter la Maison de la dernière cartouche près de Sedan), les films de Maigret que les combats d’aujourd’hui.
Car la soldatesque a une longue histoire avec les cartouches. Littéralement, ce sont de petits cylindres de carton, qui contenaient balle et poudre des fusils. C’est d’ailleurs cette notion d’étui que l’on retrouve dans les cartouches de cigarettes, d’imprimantes, etc. C’est également elle qui est à l’origine des cartouches que devaient garder sur eux les Noirs en France avant 1848, portant leur nom, celui de leur maître (ou la date de leur affranchissement), leur origine… une situation décrite par Emmanuel Dongala dans La Sonate à Bridgetower, un roman que nous recommandons à nos lecteurs.
Les états de services des soldats étaient résumés eux aussi dans des cartouches, sortes de cartes de congés, sur lesquels était inscrit le nom de leur régiment. Un cartouche jaune était alors réservé aux soldats dégradés ou renvoyés pour punition nous apprend le Littré.
C’est cette forme de cornet de papier qui donne également à cartouche ces autres sens : ornement de sculpture en forme de table avec des enroulements servant aux inscriptions, dessin en encadrement d’une pièce officielle et bien sûr, dessin qui encadre le titre, la dédicace et quelques informations permettant d’identifier une carte de géographie (une partie de ses métadonnées quoi !)
Aujourd’hui, cartouche reprend donc du galon grâce à l’Académie Française, et devient la traduction officielle « d’infobox », fiche d’information associée à un objet sur Internet. Pourquoi l’Académie a-t-elle choisi un mot français aussi « vintage » ? Cette traduction deviendra-t-elle populaire ? À suivre…