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Géomatique opérationnelle à la BSPP

Catégorie: Cartographie, Données, Institutions, Logiciels, Reportages, Sécurité/défense, Utilisateurs

Situé à l’état-major, le groupe géomatique de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) a déjà une longue expérience de l’information géographique. Une petite équipe de huit personnes s’active à fournir données, cartes et applications à tous les sapeurs-pompiers de Paris et de la petite couronne.

L’aventure cartographique a commencé en 1978 à la BSPP. Dès cette date, des plans commencent à équiper les quelque soixante-seize centres de secours de Paris et des départements de la petite couronne, mais il faut les mettre à jour sur calque au Rotring. Ce sont des milliers de feuilles A2 qu’il faut construire, imprimer afin que chaque véhicule dispose de sa bible : l’atlas parcellaire !

Les cartes sous forme d’atlas ou d’affiche restent les outils quotidiens des sapeurs-pompiers.

Les cartes sous forme d’atlas ou d’affiche restent les outils quotidiens des sapeurs-pompiers.

Des plans dans chaque véhicule

Presque trente ans et trois SIG plus tard, ces atlas n’ont toujours rien perdu de leur importance et sont toujours au centre des attentions de la cellule géomatique. Mais la production a bien évolué.

Première étape au début des années 2000 avec la création du « système d’information géographique appliqué à la recherche aux études et à l’opération » alias SIGAREO, qui s’équipe du logiciel GIPS, SIG développé par IBM. Ce sont les données de l’Agence parisienne d’urbanisme (l’APUR) qui servent de fond cartographique. Mais il faut les enrichir avec les données métier : les 43 000 hydrants, les bâtiments recevant du public (ERP) et répertoriés (ETARE), les colonnes sèches, le tout repéré au 1/2 500 et selon un carroyage spécifique qui divise tout le territoire en mailles de 200 mètres de côté. « À l’époque, les hydrants ont été récupérés de l’ancien système d’alerte » explique le lieutenant Floriane Brill, qui dirige aujourd’hui le groupe géomatique opérationnelle. Les centres de secours recevaient les plans à compléter, qui étaient ensuite envoyés au SIGAREO, corrigés et saisis. Mais GIPS est abandonné en quelques années (IBM ayant à cette époque renoncé aux SIG) et il est remplacé en 2007 par Geoconcept. L’effectif de la cellule augmente pour achever la saisie initiale des centaines de milliers de feuilles A3 qui constituent les 2 039 atlas parcellaires. Des logiciels métiers spécifiques sont développés avec l’aide de GISmartware afin de faciliter le contrôle et la rédaction des planches d’atlas. Cyril Boisseau, arrivé en 2005 dans le groupe, met en place une charte graphique homogène pour l’ensemble des productions, ce qui n’est pas une mince affaire ! En 2009, l’affaire est dans le sac et les nouveaux plans, produits à partir d’une base de données unifiée et imprimés par l’imprimerie centrale de la préfecture de police, sont disponibles dans chaque caserne et dans chaque véhicule.

Le traceur grand format de la cellule SIG, sert avant tout à produire les plans muraux, qui sont présents dans chaque centre de secours. « Avant de partir en opération, les chefs d’agrès ou les chefs d’engins y jettent toujours en coup d’œil, explique Floriane Brill. Généralement, cela suffit pour savoir où aller, car les pompiers connaissent très bien leur secteur. Mais il y a toujours quelqu’un avec le parcellaire sur les genoux en intervention. »

Grâce à une application dédiée, les casernes sont autonomes en termes de mise à jour du parcellaire, qui est effectué via le Web SIG. « À la cellule, nous ne faisons que les mises à jour complexes, détaille Floriane Brill. Un nouveau tram par exemple. »

Des applications pour chaque sapeur-pompier

Pour franchir une nouvelle étape et mettre réellement le SIG au service de tous, la BSPP s’est rapprochée des services analogues de la préfecture de police, son autorité de tutelle. Ensemble, ils ont rédigé un cahier des charges commun pour disposer d’un Web SIG décliné en une série d’applications métiers. C’est le groupement Magellium – Naomis – Esri qui a remporté le marché en 2012, et a développé un « géoportail » commun aux deux maisons, mais capable de respecter les spécificités de chacun. En cours de réception au moment de notre entretien, il permet de gérer jusqu’à cent cinquante utilisateurs simultanés. La BSPP a opté pour une licence étendue ArcGIS (ELA). Elle dispose de huit serveurs ArcGis de production et de trois pour la qualification, tous situés dans les locaux de la BSPP.

Le fond cartographique est réalisé en interne. Il se décline en quatorze échelles qui vont jusqu’au 1/250. Il est désormais enrichi par de nombreuses données : les arbres, les réseaux d’électricité et de gaz, les données INSEE à l’Iris, grâce aux nombreuses conventions mises en place. Une orthophotographie à 12 cm de résolution acquise en 2012 auprès d’InterAtlas devrait bientôt être mise à jour par une nouvelle prise de vues acquise l’an dernier.

Le serveur Joomla, la technologie Flex permettent un affichage en vues multiples et une navigation fluide. L’application de base permet d’afficher les différentes couches de données, de naviguer, de géocoder un fichier Excel, de calculer des courbes d’isodistances et des isochrones piétons ou motorisés aux heures pleines ou aux heures creuses. Les vues constituées sont également enregistrables. « Tout est partagé avec la préfecture de police, précise Floriane Brill, mais chacun garde sa charte graphique. »

Cinq autres applications sont également disponibles, avec gestion des droits. La première, baptisée « Prévision », permet aux pompiers de mettre directement à jour la cartographie et donc la base des parcellaires. Les mises à jour proposées sont ensuite validées avant d’être intégrées dans la base. « Hydrants » offre une vision précise des 43 000 bouches d’incendie du territoire de la BSPP : leur statut (privé, public), leur disponibilité, les débits avec prise en compte des débits simultanés quand certains hydrants sont liés entre eux. Ce sont les centres de secours qui surveillent leur bon état et mettent à jour la base qui est gérée par le bureau de la prévision. Quand une tournée de vérification n’a pas été faite depuis longtemps, une alerte se déclenche. L’application « SITAC » est dédiée aux situations opérationnelles. En cas d’événement, un simple glissé-déposé de pictogrammes, le dessin de quelques lignes et polygones permettent aux opérationnels de définir des zones d’exclusion, de détailler les problèmes et les forces en présence. Une version « light » sert à informer le commandement. « L’application devrait prochainement mémoriser l’historique des saisies, ce qui nous aidera à rejouer des situations tactiques » annonce le lieutenant. Pour l’instant, quand un poste de commandement est déployé, il part avec une dalle tactile équipée d’un viewer Geoconcept, mais il sera à terme équipé de l’application SITAC pour une saisie directe sur le terrain. Le module « Saisie » permet, comme son nom l’indique, toutes sortes de saisies. Il assiste ainsi les équipes qui peuvent avoir des besoins ponctuels variés : suivi d’un épisode de pollution de la Seine, d’un cross… Vient enfin l’application « Santé » qui donne une vue complète de tous les équipements, avec tous les détails nécessaires sur les hôpitaux (nombre de lits, services…). Mise à jour directement par les médecins, elle est utilisée au quotidien par ceux qui assurent les permanences au centre opérationnel.

Adagio, le système d’alerte qui équipe le centre opérationnel, ne comprend pas de brique de visualisation cartographique, mais intègre les données issues de Geoconcept. De plus, les opérateurs peuvent à tout instant ouvrir le portail géographique pour rechercher des adresses ou des objets métiers spécifiques. Car aujourd’hui, la BSPP doit encore vivre avec ses deux suites logicielles. Geoconcept pour la rédaction des parcellaires, l’impression des plans grand format, l’alimentation du centre opérationnel, et ArcGIS pour le WebSIG, ce qui implique de gérer un double circuit de mise à jour : une situation de transition qui devrait s’achever fin 2016. « Un module est en cours de développement pour réaliser les atlas parcellaires directement sous ArcMAP », reconnaît Floriane Brill.

Entre prévision et opération, le SIG de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris doit se plier aux exigences de nombreux métiers.

Entre prévision et opération, le SIG de la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris doit se plier aux exigences de nombreux métiers.

Des analyses pour l’avenir

Quant aux travaux menés directement par le groupe géomatique opérationnelle, ils jonglent également entre les deux mondes. C’est par exemple ici que sont réalisées les analyses de l’activité : nombre d’interventions, types, durées, etc. « Pour cela, nous utilisons également les données issues de la géolocalisation de nos véhicules » ajoute la responsable du groupe. C’est également son service qui élabore les cartes du prochain schéma interne directeur d’analyses et de couverture des risques (SIDACR). Mais la cellule répond à toutes sortes de demandes : création d’un nouveau point Zulu, cartographie des rues en pente qui risquent d’être verglacées en cas d’hiver froid, analyse des impacts de la fermeture des urgences de l’Hôtel-Dieu, guides opérationnels de tous types (préparation du 14 juillet ou conduite à tenir en cas de pollution de la Seine…). « Quand on doit saisir des données, on s’appuie principalement sur l’orthophotographie mais on récupère également tout ce qu’on peut » reconnaît, réaliste, Floriane Brill. La BSSP a ainsi une vingtaine de conventions d’échanges avec des organismes comme l’IAU, le STIF, etc. Mais il lui arrive également d’utiliser toutes sortes de sites Internet pour récupérer telle ou telle information.

« Les services et les centres de secours se sentent responsables de leurs données, nous avons pris le temps de leur expliquer pourquoi il était important de nous transmettre les mises à jour, se félicite Floriane Brill. De plus, nous sommes désormais soutenus par nos chefs qui ont bien compris toute l’importance de la cartographie. Cela nous aide. »

Aussi, la cellule ne manque pas de projets : fournir des plans spécifiques aux ambulances, intégrer des fenêtres de type StreetView dans certaines applications, disposer d’une couche des bâtiments plus homogène et exhaustive. « Pour cela, nous travaillons avec l’IGN sur le projet ERP, ce qui devrait nous aider à rattacher plus de données à chaque bâtiment » explique Floriane Brill. Quant à l’open data, il n’y a pas encore de position officielle même si la Brigade travaille déjà avec OpenStreetMap qui récupère certaines données du fond de plan « maison ».

 

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