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La 27e région ou l’art de co-concevoir la transformation publique

Catégorie: Institutions, Portraits, Recherche, Secteur public, Utilisateurs

Innover en matière de politiques publiques, est-ce encore possible ? La petite équipe de La 27e Région y croit, et elle le prouve, expériences à l’appui. Stéphane Vincent, délégué général de l’association, nous explique pourquoi et comment.

Pour Stéphane Vincent, les politiques publiques, c’est sacré ! Il n’a pas oublié que c’est son statut de boursier qui lui a permis de faire des études supérieures. Après avoir travaillé dans le marketing (Canal +, La Redoute…), il a passé sept ans en Limousin, à l’agence régionale de développement et au conseil régional. C’est là qu’il a été piqué par le virus de l’action publique.

Pour Stéphane Vincent, les politiques publiques, c’est sacré ! Il n’a pas oublié que c’est son statut de boursier qui lui a permis de faire des études supérieures. Après avoir travaillé dans le marketing (Canal +, La Redoute…), il a passé sept ans en Limousin, à l’agence régionale de développement et au conseil régional. C’est là qu’il a été piqué par le virus de l’action publique.

Comment est né le projet de La 27e Région ?

Il est né de la rencontre entre un philosophe, un élu régional et un consultant, tous frustrés face à l’inefficacité des politiques publiques. Mais nous savions également qu’il est très difficile d’être écouté de l’intérieur, comme de l’extérieur. À l’époque, j’étais consultant dans un cabinet privé après avoir travaillé en collectivité, et j’en avais marre des focus groupes de deux heures où l’on n’apprend rien et des rapports finaux que personne ne lit. Nous voulions remettre l’usager au cœur de la fabrique des politiques publiques alors qu’il en est bien trop souvent la variable d’ajustement, promouvoir une véritable co-conception. Pour cela, à nos yeux, il fallait associer la sociologie pour bien comprendre les usages, faire en sorte que les gens s’expriment vraiment, et le design pour rendre les projets tangibles.

L’idée est généreuse mais comment la mettre en place concrètement ?

En 2008, nous avons signé une première convention avec l’Association des régions de France afin de monter un laboratoire de transformation publique qui ne serait pas un think tank de plus, mais une sorte de Do tank, où l’on testerait concrètement les choses. La FING nous a servi d’incubateur pendant plusieurs années, avant de monter une véritable association en 2012. Nous avons mis au point notre méthode de travail et nous avons proposé aux collectivités de nous soutenir afin d’en bénéficier.

En quoi consiste votre méthode ?

Nous l’appelons « Territoire en Résidences ». Nous proposons trois semaines minimum de résidence, étalées sur cinq ou six mois. Pour chaque projet, nous construisons notre équipe qui associe sociologues, agents de la fonction publique, chercheurs spécialisés et designers. La première semaine, nous essayons de comprendre le problème, d’en repérer les nœuds principaux. Nous passons du temps avec les usagers, les élus, les fonctionnaires. Quand nous sommes intervenus sur la question de la citoyenneté dans les lycées en Rhône-Alpes, nous avons passé une semaine avec les élèves, en dormant à l’internat et en mangeant avec eux à la cantine. Ensuite, nous mettons en test les problèmes que nous avons identifiés. C’est là qu’interviennent les designers. Cela peut simplement passer par une nouvelle banque d’accueil, une signalétique modifiée, des meubles, des maquettes en carton. Nous avons par exemple défini l’architecture fonctionnelle d’une maison de santé avec ses futurs usagers et les gens qui allaient y travailler… Nous avons fait dix-sept résidences depuis 2009, pour des départements, des régions, des municipalités sur des sujets très variés : la lutte contre l’exode médical en Auvergne, le montage d’une médiathèque intercommunale dans le Puy de Dôme, l’accueil des nouveaux élus en Nord-Pas-de-Calais, les réseaux sociaux métropolitains… Ces petits laboratoires locaux peuvent également éclairer les politiques nationales. Nous avons également installé des laboratoires d’innovation dans certaines régions afin que nos partenaires deviennent autonomes.

Quelle est la place du numérique dans votre approche ?

Nous ne sommes pas des ardents défenseurs des nouvelles technologies, même si nous réfléchissons activement aux usages du numérique. Nous luttons contre l’idéologie qui fait du numérique la solution à tous nos problèmes et le seul moyen de réenchanter l’action publique. Le numérique crée autant de valeur qu’il en détruit, ce n’est pas un outil neutre. Tout comme la carte qui fait partie du panel des outils des designers. Sur la prospective des villages en Bourgogne, nos designers ont mobilisé les représentations spatiales, pour montrer par exemple la mobilité dans l’espace rural. Les Bourguignons ont ainsi découvert qu’ils n’étaient qu’à six heures de Londres. L’enjeu, pour avancer, est souvent de changer de posture, de façon de voir. Du coup, les designers choisissent les représentations qui vont permettre de faire ce pas de côté en fonction du contexte.

Il ne faut pas confondre information, connaissance et action. On peut monter des tas d’observatoires, nourris par des données géographiques et autres, de plus en plus ouvertes. Ils nous aident à mieux comprendre, mais c’est le passage à l’action qui pose souvent problème. On comprend mieux mais on n’agit pas forcément davantage. C’est pourquoi nous insistons pour mettre en avant les actions, ce qui remet les outils de la connaissance en ordre de marche.

 

Réacteur Public

Depuis 2014, La 27e Région est chargée de la maîtrise d’œuvre du programme Réacteur public, lancé par le SGMAP, le ministère de la Fonction publique, cinq régions, quelques départements, l’ENA, le CNFPT… Il s’agit de développer des contenus de formation sur les méthodes de co-conception, de valoriser les bonnes pratiques, d’animer les communautés, d’éditer des ouvrages, ce qui montre que ces nouvelles manières de concevoir des politiques publiques sont désormais prises au sérieux, comme c’est déjà le cas au Danemark où le Mindlab fête ses treize ans d’existence.
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