L’utopie de Pierre
Catégorie: Cartographie, Grand public, Portraits
Avec sa carte de Petropolis, Pierre Delestre a remporté le premier prix du concours de cartographie imaginaire. À 11 ans, ce cartographe en herbe a su associer fantaisie, esthétique et rigueur cartographique. Une leçon pour tous.
Ils étaient 800 à participer cette année au concours de cartographie imaginaire, avec deux catégories, école (cours élémentaires) et collège (ouvert aux 5e et aux 6e). « À l’annonce des résultats, j’ai failli pleurer. J’étais trop content, » reconnaît sans fausse modestie Pierre Delestre, en 6e au collège Paul Eluard à Gennes (Maine-et-Loire), qui y participait pour la première fois. Les concours carto, organisés par Olivier Godard et Marie Masson, rencontrent de plus en plus de succès et permettent aux jeunes de se mettre pratiquement à la cartographie. Ici, l’exercice est un peu différent. Il s’agit non plus de se concentrer sur un sujet d’actualité, mais de faire un pas de côté, avec une consigne cette année : cartographier un monde sous-terrain.
Un monde parfait
« On a commencé à en parler en classe avec notre professeur d’histoire-géographie, Isaline Vasselin. Pendant un mois, on en a discuté tous ensemble, avant de réaliser les premiers brouillons. » Pierre trouve l’inspiration dans ses autres cours : le monde grec. Il imagine un scénario original : « Aux temps de la Grèce antique, pendant la guerre de Troie, certains Grecs se sont réfugiés sous terre pour échapper à la guerre. Ils évoluèrent tous seuls, sans avoir de contact avec les hommes de la surface. » C’est là qu’ils construisent Petropolis, que Pierre a imaginé dans ses moindres détails : une agora, un palais royal, une acropole forment le centre de la cité souterraine. Il a tout prévu : des fermes agricoles où sont élevées des taupes (bonnes à manger), des « petites bêtes qui apportent des protéines », mais également des chauves-souris voyageuses, « qui remplacent les pigeons voyageurs pour échanger des messages ». Côté légumes, nos Grecs façon « Gaspards » se nourrissent d’endives et de champignons.
Un monde moderne
Mais ne croyez pas qu’ils échappent aux travers du monde moderne. Ils travaillent dans des « grattes-terres » ou des usines, font leurs courses au supermarché « In-Terre-Marché » et « SouterrU ». Heureusement, ils sont éclairés par des lampes à sodium géantes et peuvent circuler entre les niveaux grâce aux ascenseurs géothermiques. Des stations d’épuration de l’air et de l’eau (la ville est située au bord de la nappe phréatique méditerranéenne) leur assurent une bonne qualité de vie : lotissements (« gréco-terriers »), habitat collectif, établissements scolaires, parcs publics… ils ont tout à proximité. « Ce qui m’a plu, c’est aussi de travailler sur un espace avec beaucoup de contraintes. » L’air, l’eau, la terre, la pierre (!) Il a fallu tout penser. Étant éco-délégué de sa classe, Pierre s’est même offert le luxe de concevoir un monde durable, sorte d’utopie rocheuse.
Fantaisie et esthétique
Comment Pierre a-t-il conçu sa carte ? « J’ai commencé par imaginer ce monde dans ma tête. » Amateur de Fantasy, Pierre ne manquait pas de références : Percy Jackson, le Seigneur des Anneaux, Eragon… ses lectures l’ont poussé à réinventer le passé. Les discussions en classe et à la maison ont également fait évoluer son projet et il a multiplié les brouillons. « Mes trois frères, mes parents, ma professeur… tout le monde m’a donné des conseils. » Les codes cartographiques sont bien intégrés, mais Pierre a voulu également que sa carte soit belle. « J’aime beaucoup dessiner, je prends des cours de dessin et plus tard, j’aimerais être professeur d’Arts Plastiques. » Alors, il a choisi ses couleurs et ses formes avec application. Le résultat est coloré, organisé, amusant… une première œuvre prometteuse.