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Télédétection avec panache

| 15 janvier 2017 | 0 commentaire

Catégorie: 3D, Données, Environnement, Recherche, Reportages, Satellite/Spatial

Parce qu’ils transportent des cendres, de la vapeur d’eau et des aérosols, les panaches volcaniques sont nettement visibles sur les images satellitaires optiques. Le BRGM, l’IMO et l’INVG arrivent à en déduire leur hauteur avec une précision de quelques centaines de mètres.

Les panaches de cendres émis par les éruptions volcaniques ont des conséquences désastreuses pour la navigation aérienne et l’environnement. Pour mieux en mesurer la hauteur, les satellites sont mis à contribution.

5 milliards d’euros ! C’est ce qu’aurait coûté l’éruption de volcan islandais Eyjafjallajökull en 2010, qui a bloqué le trafic aérien pendant plusieurs semaines. C’est dire que la surveillance des panaches de cendres n’a rien d’anecdotique. Les scientifiques multiplient les projets pour arriver à mieux les connaître et les suivre. Marcello de Michele, docteur en géophysique au BRGM, ses collègues du centre de météorologie d’Islande (IMO) et de l’Institut national de géophysique et de volcanologie d’Italie (INGV) proposent une approche innovante pour en mesurer la hauteur : le calcul d’un modèle numérique de surface (MNS) de leur plafond.

Photogrammétrie sur barrette

Les nuages volcaniques sont assez nettement visibles sur les images satellitaires, mais la mesure de leur hauteur, qui peut varier de quelques centaines de mètres à une douzaine de kilomètres, est restée jusqu’à présent grossière par télédétection. La précision ne descend pas en dessous de l’ordre du kilomètre, et rend les mesures peu exploitables en termes de surveillance, d’autant plus que les panaches ont la vilaine manie de se déplacer, parfois assez rapidement. Pour être plus précis, Marcello de Michele a eu l’idée de calculer un MNS par photogrammétrie en exploitant les capacités de micro-stéréographie du satellite Landsat-8. En fait, le géophysicien utilise un biais de l’imageur : la distance de quelques centimètres qui sépare le capteur panchromatique et le multispectral sur la barrette d’acquisition pushbroom. Le petit décalage physique est suffisant pour faire une stéréoscopie, une technique qui a déjà été testée pour réaliser des modèles numériques de terrain en zone montagneuse par Alain Giros au CNES. « Si rien n’a bougé au sol, la distance mesurée dans la direction de vol du satellite, que l’on appelle direction épipolaire, est uniquement sensible à la hauteur » complète le chercheur. Mais le panache, lui, bouge en permanence et même en moins d’une seconde, des effets de fausse parallaxe troublent les mesures photogrammétriques. « Nous utilisons la distance dans la direction perpendiculaire à l’épipolaire, qui, elle, n’est pas sensible à la topographie mais uniquement à la vitesse de l’objet mesuré. » Reste alors à mettre en carte la disparité corrigée entre les deux images pour obtenir un modèle numérique de surface avec une maille de 250 mètres de côté. Pour tester la méthode, l’équipe a récupéré les images acquises par Landsat-8 du volcan islandais Holuhraun, entré en éruption en 2014, et les ont comparées aux mesures effectuées grâce aux nombreux capteurs au sol. « Nous arrivons à une précision de l’ordre de 300 mètres » se félicite Marcello de Michele.

Vers une approche multi-satellite

Aujourd’hui, le géophysicien teste la méthode avec des images Pléiades et a déposé un dossier de recherche pour exploiter des données Sentinel-2. Des essais vont également être menés sur l’irruption d’Eyjafjallajökull avec des images Spot 4 et 5. L’idéal serait d’en déduire des volumes, qui permettraient une meilleure appréciation des masses en suspension. Pour cela, les chercheurs misent sur les mesures in situ.

« Pour l’instant, nous en sommes encore à la phase de recherche et développement, insiste le géophysicien. Pour être opérationnel, il faudrait pouvoir s’appuyer sur une grande variété de satellites, avec des algorithmes adaptés à chaque capteur afin d’être sûrs d’avoir régulièrement des images dès qu’une éruption s’accompagne d’un nuage de cendres. » Un vœu pieux ? L’annonce de trains de satellites, de constellations de microsatellites… permettra peut-être d’aboutir à un service opérationnel de surveillance d’ici quelques années, d’autant que la méthode est très automatisable. Encore faut-il connaître avec précision la géométrie des capteurs, ce qui est rarement le cas pour nombre de satellites commerciaux !

 

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