Une géographe chez les statisticiens
Catégorie: Données, Portraits, Recherche, Secteur public, Utilisateurs
Femme de passions, Brigitte Baccaïni a su très jeune qu’elle serait géographe. Avant de devenir sous-directrice de l’observation et des analyses statistiques au CGET, elle a fait souffler le vent de la géographie à l’INED, à l’INSEE et en direction régionale de l’agriculture. Avec des outils en poche : la carte et les SIG.
Pianiste ou géographe ? Sciences dures ou sciences humaines ? Grâce à une enseignante passionnante au collège de L’Haÿ-les-Roses, c’est pour la géo qu’opte Brigitte, malgré ses bonnes notes en sciences. Bonne élève, elle entre en hypokhâgne, mais en ressort bien vite. « J’adore la littérature et je ne sais plus où ranger mes bouquins, mais passer trois semaines sur quelques phrases de Balzac, ce n’était pas pour moi. »
Débuts dans l’enseignement et la recherche
À la Sorbonne (Paris I), elle se prend rapidement de passion pour les approches quantitatives. Maîtrise, DEA puis thèse… le parcours est classique, mais cette bosseuse brillante a également besoin de gagner sa vie et passe son agrégation. Du coup, voilà Brigitte Baccaïni enseignante d’histoire-géo dans différentes petites villes de Champagne-Ardenne. Une rude épreuve par moments mais qu’elle mène haut la main. En 1991, elle soutient sa thèse sur le lien entre les parcours résidentiels et les cycles de vie, exploitant une base de données constituée par des chercheurs de l’INED, quelques semaines après l’accouchement de son deuxième enfant. Elle passe ensuite six ans à l’INED en tant que chargée de recherche. Là, elle continue à travailler sur les mobilités et développe des méthodes innovantes. Pourtant, « je me sentais parfois un peu seule comme géographe. Et puis, la recherche pure ne me satisfaisait pas complètement, j’avais envie de missions plus opérationnelles ».
En région
En 1998, avec une paire de jumeaux en plus, l’appartement parisien devient très étroit et elle saisit l’opportunité de partir à Lyon au pôle méthodologique de l’INSEE. Le recensement en continu est à l’étude. Comment mesurer les migrations et les mobilités avec ce nouvel objet statistique ? Brigitte Baccaïni s’attelle à la tâche. Repérée comme la géographe de la boutique, elle est appelée en 2004 pour diriger le pôle d’analyse territoriale situé à l’INSEE à Marseille. Nouveau déménagement familial, nouvelle ville, nouvel attachement. « Tout était à monter. Nous avions un pôle cartographie très dynamique avec qui nous avons développé des méthodes et des outils exploitables par tous les chargés d’études de l’INSEE. » Elle se bat pour développer un minimum de culture cartographique dans l’institut. Cinq ans plus tard, une nouvelle aventure lui est proposée : la direction du service régional de l’information statistique et économique à la Direction régionale de l’alimentation de l’agriculture et de la forêt (DRAAF PACA). Arrivée au moment du recensement général agricole, elle participe à la réalisation d’enquêtes, d’analyses, à la rédaction de notes de synthèse… et découvre des collègues passionnés et passionnants.
Retour à la capitale
En 2012, après avoir lâché quelques enfants partis vivre leur vie, la famille revient à Paris et Brigitte Baccaïni devient chef de la division des études territoriales à l’INSEE, en charge des données infra-communales. Passer des conventions avec les administrations, produire et diffuser les données carroyées… autant de sujets qui la rapprochent progressivement de la dimension urbaine. Aussi, quand elle apprend que le futur CGET intègrera une direction de l’observation et des analyses statistiques, elle pose rapidement sa candidature.
Depuis septembre 2014, Brigitte Baccaïni pilote deux bureaux, l’un consacré à l’observatoire de la politique de la ville et l’autre dédié à l’observatoire des territoires. Deux dispositifs qui ne cessent d’évoluer et qui s’appuient sur de nombreuses données géographiques. Même si le temps est loin où elle réalisait elle-même ses premiers lissages sous MapInfo, Brigitte Baccaïni est consciente des évolutions du petit monde de l’information géographique. « Nous devons apprendre à mieux collaborer entre administrations et avec les collectivités. Aujourd’hui les organismes comme l’INSEE ou le CGET n’ont plus le monopole de l’analyse territoriale : il y a plein de bureaux d’études, d’agences d’urbanisme, de villes… qui font des choses formidables. L’enjeu est de faire parler les différentes échelles. » Décrire un quartier c’est bien, mais si son environnement n’est pas pris en compte, l’analyse reste partielle. « Les sources de données se renouvellent. Le big data nous concerne tous : données accumulées par des opérateurs privés, mais aussi administrations elles-mêmes qui en produisent beaucoup. Les statisticiens ne doivent pas rater ce virage. »