Une IDG aux pieds d’argile
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L’annonce de la liquidation de l’APEM nous rappelle que les infrastructures de données géographiques sont des êtres fragiles. Alors que l’Assemblée Pyrénéenne d’Économie Montagnarde s’apprêtait à fêter son vingtième anniversaire, la voilà contrainte de fermer ses portes. Et de laisser ses utilisateurs en plan !
Porteuse du SIG Pyrénées, d’un outil de diagnostic pastoral, de plusieurs observatoires sur l’artisanat, le tourisme, le changement climatique, maillon très actif dans la gestion des dessertes forestières et des sentiers de randonnées… l’APEM s’est progressivement imposée comme une véritable infrastructure au service de l’information géographique mutualisée. Pour favoriser le développement durable du massif pyrénéen, elle a misé depuis longtemps sur le numérique. À cheval sur six départements, mais également sur trois (puis deux régions) et deux pays… elle a montré que la synergie entre acteurs peut soulever des montagnes ! Malgré ses succès et un programme de travail toujours chargé, l’association est désormais en liquidation. Que s’est-il passé ?
Trop originale
C’est sans doute parce qu’elle a transgressé les frontières que l’APEM s’est avérée si fragile. Née d’une vision géographique (les Pyrénées constituent un ensemble ayant des problématiques spécifiques), son portage politique reposait sur la mobilisation des chambres consulaires (chambres des métiers, d’agriculture et de commerce) et non sur les conseils régionaux ou départementaux. Du coup, son financement était mal assuré, dépendant de fonds structurels européens désormais aux mains des régions, qui ont leurs propres structures de mutualisation et qui sont en plein questionnement sur leurs compétences. L’association devait également enchaîner les projets pour satisfaire ses membres, d’où la richesse de son portefeuille de services. Mais ce mode de financement, de plus en plus populaire à l’heure où chacun fait la chasse aux économies, laisse dans l’ombre tout le travail de fond nécessaire pour constituer des bases de données pérennes, les entretenir, les diffuser. « Il y a quelques années, un catalogue ou un site de diffusion était quelque chose de nouveau et d’innovant, on trouvait des financements, rappelle Laurent Plainecassagne, le premier directeur de l’APEM, aujourd’hui à la tête de Datakode. Maintenant, c’est rentré dans les mœurs, c’est devenu presque invisible et sans vrai budget de fonctionnement, c’est impossible à financer. »
Démutualisation douloureuse
Du coup, après avoir pratiqué la mutualisation, voici venue l’heure de la démutualisation, puisqu’il s’agit pour certains de récupérer les projets qu’ils ont financé et sur lesquels ils comptent maintenant au quotidien. Une opération dont la facture risque d’être salée, même si elle est moins visible. Les IDG régionales sont également appelées à la rescousse pour reprendre certaines données et certains services, qui risquent de perdre leur dimension « massif » au passage. Mais la solution ne fait que repousser la question des financements et des moyens humains. « On nous demande faire les pompiers, de reprendre les données et les services afin de les sécuriser, reconnaît Laurent Pigache, directeur d’OPenIG, l’IDG d’Occitanie. Mais avec quels moyens allons-nous mener ces nouvelles missions ? Nous sommes déjà trop peu nombreux ! ».
Il a fallu 15 ans pour monter les projets, pour faire entrer la mutualisation dans les mœurs, pour faire connaître la démarche… combien de mois faudra-t-il pour défaire l’écheveau qui laisse aujourd’hui sur le carreau quatre employés et des centaines d’utilisateurs ?