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Les IDG, de la construction à l’action

| 15 décembre 2016 | 0 commentaire

Catégorie: Données, IDG/IDS, Reportages

Les infrastructures de données géographiques (IDG) régionales se sont retrouvées mi-novembre à La Baule. Deux cent cinquante participants venus de toute la France, deux jours de débats et de discussions… montrent que ces structures ont un vrai rôle à jouer dans le paysage géomatique national. Un rôle qu’elles doivent défendre et qui les pousse à se renouveler.

Pour cette neuvième édition, une vingtaine de partenaires industriels et institutionnels avaient fait le déplacement jusqu’à La Baule, preuve que les IDG sont désormais reconnues comme un acteur clé du paysage géomatique.

Qu’est-ce que l’intelligence ? « C’est construire un modèle du monde et agir dessus », propose Dileep George, le fondateur de Vicarious, l’une des étoiles montantes de l’intelligence artificielle. Une définition qui devrait résonner aux oreilles des animateurs et utilisateurs des IDG, réunis cette année sur le thème « la géomatique au service de l’intelligence territoriale » sous l’égide de l’Afigéo, de GÉOPAL et de leurs partenaires.

Acquisition, mutualisation, diffusion

Car les IDG occupent désormais une place incontournable dans cette construction d’un modèle du monde, pris au sens géographique du terme. Vincent Deshoux, animateur de GÉOPAL a listé quelques-unes des bases de données qui ont pu être acquises ou constituées grâce à l’IDG des Pays de la Loire : référentiels de l’IGN, Litto3D, biodiversité, ortho-photographies de plus en plus précises, occupation du sol… Ces données entrent dans des processus opérationnels, elles participent à l’élaboration et au suivi des politiques publiques. C’est par exemple Litto3D qui sert de base aux modélisations effectuées par le service d’incendie et de secours (SDIS) de Vendée, comme l’a rappelé le colonel François Gros.

Les IDG continuent à être essentielles dans le montage de projets d’acquisition. Et elles s’attaquent désormais à toutes sortes de données thématiques. GÉOPAL participe ainsi activement au montage d’un observatoire régional des risques côtiers, placé sous la responsabilité de l’université de Nantes, qui permettra à son tour de mutualiser l’acquisition de données détaillées sur le littoral en Lidar et en imagerie hyperspectrale. Un projet est également en cours sur la qualité de l’air, un autre sur les lieux publics.

Ces projets thématiques s’appuient sur les groupes de travail, pôle métiers ou autre dénominations. Certainement l’activité la plus chronophage pour les animateurs d’IDG, mais celle qui permet aux communautés de se constituer et d’avancer ensemble. Analysant les IDG, les chercheurs du projet GÉOBS ont dénombré pas moins de 132 pôles métiers pour 45 infrastructures (dont 29 à dimension régionale). Ces derniers ne concernent pas que des projets à l’échelle régionale. En Pays de la Loire, le groupe de travail dédié au plan de corps de rue simplifié (PCRS) a permis aux agglomérations de partager leurs expériences, de faire le tour des solutions techniques. « GÉOPAL nous a aidés à réaliser notre cahier des charges en nous mettant en contact avec d’autres collectivités » note par exemple Laurence Chanteau du Mans Métropole.

Les IDG sont également des vecteurs de diffusion. Le Conservatoire botanique national de Brest a créé un lien direct entre son propre site de diffusion (eCalluna) sur les plantes vasculaires (fougères, plantes à graines ou à fleurs) et le portail de GÉOPAL, afin de toucher un public hors de sa sphère naturaliste, avec une information légèrement moins détaillée. « Il y a beaucoup d’effets positifs dans cette collaboration. On s’assure ainsi de la cohérence entre les données à différentes échelles, » rappelle Christophe Bourgault, coordinateur SIG au Conservatoire botanique national de Brest.

Les IDG régionales (en vert clair) sont en étroites relations avec les IDG nationales, thématiques et infrarégionales comme le montre ce schéma qui représente les liaisons liées au catalogage et à la diffusion de données (Projet GÉOBS).

Mais les IDG régionales ont toujours du mal à être reconnues en tant que telles, car les activités sur l’acquisition de données ne sont pas suffisantes pour leur donner de la visibilité. Sur la route, on voit passer les voitures, pas les réservoirs plein de carburant !

Données géographiques et ouvertes

Pourtant l’importance des données est mieux reconnue, notamment grâce à la thématique de l’open data, qui concerne, sans doute pour moitié, des données à caractère géographique. « Sur les six premières bases de données étudiées dans le cadre de la loi numérique afin de constituer un service public de la donnée, quatre sont géographiques » rappelle Line Chinchole, chef du bureau de la contractualisation de l’évaluation et des études au secrétariat général pour les affaires régionales (SGAR) des Pays de la Loire.

Et chacun sait que ces fameux « territoires intelligents » tant attendus, auront besoin de carburant géographique pour fonctionner. Qu’ils soient vus comme des espaces pilotés au quotidien par un ensemble de capteurs connectés mesurant en permanence le fonctionnement de la ville et de ses réseaux, ou comme des territoires co-construits avec les citoyens… ils ne pourront se faire sans un socle minimum et partagé de données territoriales.

Question de place ? Les dispositifs de mutualisation sont de plus en plus nombreux. Au cœur de la matrice entre échelles territoriales et centres d’intérêt thématiques… les IDG régionales doivent trouver les bonnes règles de fonctionnement. Le sujet les occupe mais elles semblent bien s’en sortir à condition de clarifier les rôles de chacun, de s’organiser pour inclure collectivités et services de l’État, et surtout de respecter les prérogatives de chaque échelle. En Pays de la Loire, la thématique de l’adresse a été prise en charge par GéoVendée, IDG départementale historique, qui a développé un outil de mutualisation des adresses, saisies par les communes et intercommunalités depuis leurs SIG habituels et alimentant une base de données unifiée, qui renvoie à son tour les modifications vers les bases adresses des partenaires (SDIS, IGN…). L’outil est actuellement testé sur deux collectivités et devrait être déployé en septembre 2017. Espérons simplement qu’il saura se raccrocher à la base adresses nationale (BAN) pour assurer un peu de cohérence nationale.

Question de langage également. « Après la directive INSPIRE, l’open data constitue un nouveau levier pour diffuser l’information géographique, analyse Christine Archias, la directrice du CRIGE PACA. La plupart des plateformes l’ont bien compris et elles s’activent. Cet activisme sur l’ouverture de la donnée a fondé les plateformes régionales mais avec un vocabulaire différent. Nous devons être reconnus comme un acteur du déploiement de l’open data, mais ce n’est pas encore le cas. » Force est de constater que les IDG ne sont pas mentionnées dans le rapport fourni par OpenDataFrance à Axelle Lemaire, alors qu’elles contribuent largement au mouvement. Si les deux démarches partagent un même but (la diffusion des données), elles ne l’abordent ni avec la même philosophie ni avec le même degré de maturité. « Les IDG proposent des données structurées, avec une approche métier. Les utilisateurs sont connus. Tout cela a un coût mais le système est mature, analyse Claire Gallon de LiberTIC. L’open data est beaucoup moins mature et moins évolué en termes de qualité. Par contre, il a une forte capacité à mobiliser des producteurs externes. Il commence à mûrir. » Les deux mondes ont tout intérêt à travailler ensemble. Les IDG ont une connaissance des formats, des échanges, de la notion de qualité qui peut intéresser les acteurs de l’open data, qui, eux, en savent beaucoup plus sur la mobilisation, la collaboration et les usages. « Demain, données ouvertes et géographiques seront-elles publiées sur le même outil ? Se demande encore Claire Gallon. On en est encore loin. Les publics cibles ne sont pas les mêmes, les outils techniques ne sont pas les mêmes. » Partir d’un système d’information commun capable de servir différents publics et différentes fonctionnalités ? Proposant à la fois du reporting, de la cartographie, du téléchargement à destination d’utilisateurs et de développeurs ? « Les questions sont plus organisationnelles que techniques » prévient Claire Gallon.

Comment les IDG parlent-elles d’elles-mêmes ? Jade Georis-Creusevrau et Françoise Gourmelon ont présenté quelques analyses menées dans le cadre du projet GÉOBS sur le contenu des sites Web des IDG. Quatre types de discours prévalent : le thématique (l’eau, le paysage, la mer…), le performatif (mutualiser, décider, partager…), l’organisationnel (État, conseils, régions…) et le discours technique (métadonnées, INSPIRE, open data…). Les IDG associant collectivités et État ont un discours plus performatif que celles uniquement pilotées par l’État, qui parlent plus technique.

Vers de nouveaux usages

La focalisation sur les données peut ainsi s’avérer à double tranchant. D’un côté, elle a permis aux IDG de se développer par le biais d’économies d’échelles et de montées en capacité des acteurs locaux. De l’autre, elle les rend transparentes politiquement, invisibles à celles et ceux qui pilotent les politiques publiques, et qui, quand ils parlent données, ne parlent qu’open data.

« Nous avons acquis les fonds, note Vincent Deshoux, maintenant, il faut aller vers les usages et les services. » Pionniers dans la diffusion de données et l’animation de communautés d’utilisateurs, les IDG régionales veulent maintenant fournir des services clés en main aux acteurs territoriaux. Ces derniers sont-ils demandeurs ? Les IDG ont-elles les moyens de concevoir des offres de haut niveau ? Elles qui se sont jusqu’à présent positionnées comme des fournisseurs de données et d’information, sont-elles vraiment prêtes à franchir un pas de plus, quitte à perdre un peu de leur neutralité politique ? Il ne suffira sans doute pas de s’inscrire dans la nouvelle mouvance des « réseaux de la connaissance » pour être reconnus comme des acteurs clés de la décision publique. Elles ont construit un modèle du monde, sont-elles prêtes à agir dessus ?

 

IDG, de quoi parle-t-on ?
Les infrastructures de données géographiques sont des structures plus ou moins formalisées (associations, GIP…) qui œuvrent à la constitution, au partage et à la diffusion d’informations géographiques. Leur champ d’action peut être thématique (biodiversité, risques…) ou spatial (national, régional, départemental, local…). Elles rassemblent généralement les acteurs publics (services de l’État, collectivités, parfois associations et monde éducatif) et plus rarement le secteur privé. Elles animent des communautés d’utilisateurs et s’appuient sur des plateformes techniques (également baptisées IDG) qui assurent la diffusion des données et leur catalogage. Les IDG régionales sont des relais essentiels dans la mise en œuvre de la directive INSPIRE et sont désormais reconnues comme un maillon clé de l’organisation nationale en matière d’information géographique publique.

 

  • Retrouvez les présentations et le compte rendu des 9e Rencontres des dynamiques régionales en information géographique sous ce lien

 

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