Chroniques d’un GEOINT au goût de COVID.
Épisode 4
Catégorie: A l'actu, Entreprises, Imagerie, Marché, Matériel/GPS, Satellite/Spatial, Sécurité/défense
La chronique GEOINT de Thierry Rousselin, TMCftn
Dans la pagaille ambiante, le petit monde de l’intelligence géospatiale, alias GEOINT, ne pouvait pas rester à l’écart. Faisons le tour des acteurs… et de leurs actions. Et après la Chine, la Défense US et les tagueurs, que s’est-il passé chez les lanceurs compulsifs de satellites ?
Même si une partie des 16 000 avions stockés au plus fort de la crise ont redécollé, les images pathétiques d’appareils cloués au sol se sont échangées durant toute la période comme symbole de l’arrêt de toutes nos activités. Mais il est un drame moins connu et plus discret de la période récente : les satellites d’observation de la terre stockés dans leur salle blanche, faute de possibilité de décoller.
Certes, la Chine a poursuivi le rythme de lancement de ses principales missions d’observation et de localisation. Et Elon Musk, avec la régularité d’un chef de gare de la IIIe République, continue à lancer ses satellites de communication Starlink par paquets de 60,déclenchant à chaque fois l’ire des astronomes.
Planet attendra
Lancer est essentiel pour tout le monde. Pour ceux qui n’ont qu’un satellite, c’est évident. Mais pour les nouvelles constellations, c’est tout aussi crucial du fait de la faible durée de vie de chaque satellite. Depuis 2013 Planet a lancé 398 satellites (en incluant les 47 échecs), mais les 184 satellites des deux premières générations (Flock 1 et 2) sont déjà morts ou obsolètes. Et la capacité opérationnelle actuelle repose sur un mélange hétéroclite entre 20 satellites de 4e génération (les SuperDoves) lancés en 2019 et ce qui reste des 127 satellites de 3e génération, lancés en 2017 et 2018.
L’opérateur californien doit donc renouveler chaque année 40 satellites. Mais il n’a rien lancé au premier semestre. De plus, en application de la célèbre loi de Murphy, il en a perdu 5 lors de l’échec Elektron du 4 juillet. Il croise désormais les doigts pour le succès du tir européen Vega qui doit en embarquer 26 d’un coup cet été. Seule bonne nouvelle dans un printemps maussade, la baisse d’altitude des satellites de sa constellation haute résolution SkySat (anciennement propriété de Skybox Imaging puis de Google Terra Bella) et le lancement réussi le 13 juin des satellites n° 16 à 18 lui permettent d’offrir à ses clients deux revisites chaque jour à 50 cm de résolution de n’importe quel point du globe. La société en a d’ailleurs profité pour faire évoluer l’interface permettant aux clients de programmer les prises de vue.
Capella déchante
De même Capella Space, premier des nouveaux opérateurs radar américains, qui espérait creuser l’écart avec ses concurrents Umbra Lab (prévu pour fin 2020) et PredaSAR (prévu pour 2021), attend toujours le lancement de son deuxième POC (« Proof Of Concept », initialement prévu à l’été 2019) avant de satelliser d’ici la fin de l’année ses 4 premiers satellites opérationnels.
Les convoyeurs attendent
Et la liste d’attente du bon à tirer est longue avec des projets espagnols, italiens, argentins, indiens, japonais, américains, finlandais, anglais, émiratis et on en passe, tant institutionnels que commerciaux. D’autant plus que les acteurs qui avaient prévu de lancer fin 2020 ou en 2021 comme les deux leaders mondiaux Maxar (avec les lancements de la constellation Legion) et Airbus DS (avec les Pleiades Neo) n’entendent pas céder leur place et maintiennent leur calendrier initial.
Pourtant, qui a réussi à lancer tranquillement durant ces six derniers mois ? Les gardiens de la révolution iraniens qui, à la surprise générale, ont réussi la satellisation de Noor-1 le 22 avril… et les Israéliens qui leur ont répondu avec Ofeq 16 le 6 juillet. Comme quoi, dans ce monde perturbé, il reste quelques éléments de stabilité !