Infographier le monde
Catégorie: Cartographie, Grand public, Livres, Arts, Expos, Portraits
Passée par les études littéraires et d’art, Clara Dealberto est aujourd’hui infographiste chez Big et travaille principalement pour Libération. La carte fait partie de son langage pour rendre le monde plus compréhensible, ce qu’elle fait avec rigueur et humour.
Après deux ans de classes préparatoires littéraires au lycée Fénelon à Paris, Clara Dealberto s’inscrit en fac de lettres puis d’anglais. Mais c’est finalement aux Beaux-Arts de Rennes qu’elle trouve sa voie. Elle s’initie à la communication visuelle et au graphisme : « je me suis aperçue que j’aimais bien les contraintes, répondre à une commande. » C’est même à Rennes qu’elle découvre Jacques Bertin et la sémiologie graphique, alors qu’elle travaille sur un projet de notation musicale.
Du Monde à Libé
Grâce à son book très orienté graphisme, elle décroche un CDD au Monde dès son retour à Paris en 2015. « L’infographie, c’est vraiment un travail de traduction, on retranscrit les chiffres et les données dans un autre langage. » Pendant quelques mois, elle s’installe ensuite en free-lance, ce qui lui donne l’occasion de construire des illustrations et des infographies pour les Échos Week-end, La Vie, Le Monde des religions et diverses agences. Depuis six mois, infographiste chez Big, c’est dans Libération que vous trouverez ses productions, mais également sur son site et sur son fil twitter, plein d’humour sur la vie des graphistes, de « cartes poétiques » et de tableaux « photoshopés ». Il faut dire que la cartographie fait désormais partie de son quotidien, puisque Jules Grandin, rencontré sur les bancs de Fénelon, est aujourd’hui son compagnon. Devenu lui-même cartographe après un master Carthageo, il dirige aujourd’hui le service infographie des Échos.
Cartographe par capillarité
« Même si je n’ai pas une passion pour les cartes, je les ai toujours bien aimées. Il y a plein d’aspects qui m’intéressent. » La cartographie est un élément de la panoplie de graphiste de Clara Dealberto. « La première fois que j’ai été vraiment impressionnée, c’est quand je me suis rendu compte que je pouvais moi-même faire une carte. » Ainsi, sans formation dédiée, elle a appris à manipuler tableaux et tableurs, à gérer ses fonds de cartes avec QGIS, puis à travailler la représentation sous Illustrator. Avec son compagnon, elle apprend à coder pour publier des cartes pour le web et à réaliser des applications de visualisation (à suivre par exemple sur @GoumProd). Mais Clara reste vigilante. La représentation cartographique n’est pas une fin en soi quand on fait de l’infographie pour la presse. « La carte est de plus en plus reconnue dans la presse, mais il y a parfois la tentation de faire des cartes sur des sujets où ce n’est pas nécessaire. Il vaut mieux juste situer un évènement ou un sujet et compléter par une infographie plutôt que de faire une jolie carte qui n’apportera rien à la compréhension du sujet. » Et dans la presse, il faut être à la fois efficace et créatif. Tout l’inspire, aussi bien les grands atlas, imaginaires ou géographiques, que les dataviz de David McCandless.
À Libération, elle travaille avec les journalistes pour trouver la représentation la plus juste, la plus parlante, avec ou sans carte. « Ce qui est passionnant, c’est de développer des infographies sur des sujets a priori non « infographiables ». Les gens apprécient et le journal nous laisse de la place. » C’est par exemple dans un espace correspondant à celui dans lequel vit une poule en batterie qu’elle a réalisé une infographie sur le sujet.
Confiante dans le rôle des infographistes, maillons essentiels entre données et récits, entre journalistes et lecteurs, Clara Dealberto nous fait entendre une voix originale, qui renouvelle les codes et installe la carte comme un élément essentiel d’une communication de qualité.