Les objets connectés partent en campagne
Catégorie: Données, Entreprises, Environnement, Marché, Matériel/GPS, Recherche, Reportages, Utilisateurs
Les objets connectés ne concernent pas que les bobos, leurs voitures ou les villes intelligentes qu’ils habitent. Ils intéressent de très près le monde agricole. Mais la campagne impose ses contraintes, notamment en termes d’autonomie et de réseaux. Du coup, la géolocalisation doit se réinventer.
50 milliards d’objets connectés en 2020, un marché mondial de 19 000 milliards de dollars en 2025, telle est aujourd’hui la prédiction de Cisco ! Si la ville avec ses infrastructures, ses immeubles, ses habitants et ses véhicules est au cœur des préoccupations des acteurs de ce marché émergent, ils n’oublient pas le monde agronomique et agricole. Les domaines d’application sont nombreux : mesure de l’impact environnemental (contrôle de l’eau, de la qualité de l’air), optimisation énergétique des serres, instrumentation du matériel agricole pour optimiser les rendements et minimiser les intrants, caractérisation des milieux, détection de pathogènes… Les agriculteurs sont de plus en plus connectés : « Neuf agriculteurs sur dix commencent par consulter la météo sur leur mobile chaque matin, remarquait Alexandre Diaz d’Isagri lors du séminaire AgroTIC sur le sujet organisé en avril 2016. Mais plus de la moitié n’ont pas accès au haut débit. »
Effectivement, en attendant un monde entièrement couvert en 5G, les communications « machine to machine », essentielles aux objets connectés, doivent s’appuyer sur d’autres techniques. « Les standards bien établis comme le Bluetooth ou le WiFi ont une faible portée et une forte consommation énergétique, analyse Jean-Pierre Chanet de l’IRSTEA. Les 3G, 4G coûtent cher, épuisent également les batteries, mais ont une longue portée… en dehors des zones blanches. D’où l’intérêt des solutions à longue portée comme SIGFOX ou LoRa. Mais attention, même si leur consommation énergétique est faible, elles ne sont adaptées qu’à de faibles volumes de données. »
Des réseaux bas débit et longue portée déjà bien constitués
Avec 1 500 antennes en France, le réseau SIGFOX couvre 92 % de la population. D’abord centré sur les villes, il s’étend désormais aussi dans les campagnes. Les objets connectés au réseau SIGFOX peuvent envoyer jusqu’à 140 messages par jour, qui doivent rester simples (12 bits en montant), donc inadapté à la transmission d’images par exemple. Son concurrent LoRa, aujourd’hui porté par un large consortium d’entreprises, notamment Orange et Bouygues Télécom en France, annonce qu’il couvrira toute la France fin 2016.
En quoi ces technologies de communication peuvent-elles fournir des informations de géolocalisation ? Les réseaux savent déjà transmettre des coordonnées GPS, mais à un rythme insuffisant pour assurer un suivi en temps réel d’objets en déplacement. Mais c’est déjà suffisant pour toute une série d’applications. Le piège à insectes connecté CapTrap développé par Cap2020, communiquant via le réseau SIGFOX, contient une puce GPS, ce qui permet de le déplacer en cas de besoin.
« Au second semestre, on pourra également faire de la géolocalisation d’objets connectés au réseau LoRa, avec une précision de l’ordre de dix mètres en extérieur, explique Pierre Madillo d’Orange. Faire de la triangulation implique que nos passerelles (gateways) soient précisément positionnées dans l’espace et que l’horodatage soit affiné. »
Même si ces réseaux sont aujourd’hui insuffisants pour guider un tracteur en temps réel, ils ont toute leur utilité pour des besoins de géolocalisation plus grossière. La densification progressive du réseau d’antennes rendra celle-ci de plus en plus précise. Quels en seront les usages ? L’avenir appartient à ceux qui auront les bonnes idées. « Nous ne sommes qu’au début de l’histoire, rappelle Jean-Pierre Chanet. Pour l’instant, on donne de la connexion à des objets existants, tels que tracteurs, stations météo, etc. » L’enjeu est désormais d’inventer de nouveaux objets communicants et géolocalisables.