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QGIS : un succès pas toujours facile à financer

| 6 janvier 2020 | 0 commentaire

Catégorie: Logiciels, Marché, Reportages, WebMapping

Environ 4 mn de lecture

Devenu le SIG bureautique le plus populaire en France selon Google Trends, QGIS s’étoffe de version en version. Mais son financement relève parfois du casse-tête.

Malgré les grèves, la réunion des utilisateurs QGIS, organisée à Montpellier les 12 et 13 décembre 2019, a rassemblé plus de 70 personnes. Après un jour de barcamp, les retours d’expérience et les questionnements autour du projet ont dominé la deuxième journée.

QGIS financement

Dans Google, les requêtes sur ArcGIS sont toujours nettement plus nombreuses que celles sur QGIS. Mais l’évolution depuis 2004 montre la popularité croissante du logiciel libre. En France, la situation s’est même inversée en 2013.

Un outil complet et dynamique

« En 2002, lors de sa création, Quantum GIS n’était qu’un viewer pour PostGIS » rappelle Marco Bernasocchi , coprésident de l’association internationale QGIS.org. 18 ans plus tard, QGIS est devenu « le » SIG bureautique open source, talonnant ArcGIS dans les recherches sur Google. Fonctions, modules, formats, déclinaisons mobiles et thématiques… QGIS a su se développer et suivre les évolutions technologiques. Avec une version tous les quatre mois et une release à long terme (LTR) par an, le projet fait également preuve d’un grand dynamisme. Et pour cause ! Même si les calculs sont très approximatifs et à prendre avec beaucoup de précautions, « en se basant sur le nombre de lignes de code, il y a à peu près 490 années de travail sur QGIS » ose Marco Bernasocchi, soit une belle équipe de développement.

Une modeste fondation

Pourtant, le budget de la fondation qui porte QGIS est ridicule (151 000 € de recettes en 2018). En effet, l’immense majorité des développements est portée par un écosystème de bénévoles ainsi que par les entreprises qui travaillent sur le projet via des commandes clients spécifiques. Mais, à l’heure où QGIS est devenu un outil professionnel indispensable pour beaucoup, cette situation est-elle raisonnable ? C’est la question de pose Hugo Mercier d’Oslandia.

L’écosystème d’entreprises qui travaillent avec QGIS tout en participant à son développement s’étend et semble bien se porter. La gouvernance ouverte du projet leur permet de faire évoluer le logiciel, de développer de nouveaux modules et composants tout en restant proche des besoins des utilisateurs. Afin de rassurer ces derniers et de les accompagner dans l’utilisation du logiciel, les entreprises proposent des prestations de support et de maintenance sur les logiciels open source comme QGIS.

QGIS financement

Alors que la France est le quatrième pays en termes de téléchargements de QGIS, elle n’est que 17ème (rapporté à sa population) dans la liste des donateurs à la fondation QGIS.

Des campagnes de financement participatif

Même si le don n’est culturellement pas développé dans le monde professionnel en Europe, le financement participatif représente une alternative intéressante, comme l’a rappelé Hugo Mercier. Lancés par North Road, Opengis.ch, Lutra Consulting, Oslandia… les campagnes permettent de rassembler des contributeurs autour de projets précis. Ainsi, en septembre 2016, North Road a récolté 2 300 € auprès de quatre contributeurs afin de financer le développement du moteur de rendu pour les groupes de points (cluster rendering). Ces appels concernent plutôt des petites sommes, mais certains ont permis d’aller jusqu’à 30 000 € (développements des rapports) voir beaucoup plus (144 000 €) quand il s’est agi de créer PROJ 6 (composant de GDAL pour la transformation de coordonnées), une brique qui concerne de nombreux éditeurs commerciaux qui ont participé au financement, comme Esri ou Safe software (l’éditeur de FME). « Mais ces programmes de cofinancement restent limités, souligne Hugo Mercier, et ne sont pas très rentables. Ils servent souvent à rembourser des investissements déjà faits. » Le contributeur souligne également le flou contractuel derrière le financement participatif qui transforme chaque cofinanceur en client. Il lance un appel pour qu’émerge une plateforme tierce, neutre et légitime, capable de faire le lien entre les développeurs et les financeurs, simplifiant ainsi les aspects réglementaires et permettant aux structures publiques de participer.

Tout n’est pas financé à la même hauteur

Si le mix de financements actuels (fondation, bénévolat, interventions dans le cadre de développements ad hoc, financements participatifs) a des avantages en termes de dynamisme du développement et d’adaptation aux besoins utilisateurs, il a aussi ses revers : marketing, documentation, traduction, corrections de bugs mineurs peinent à être financés.

QGIS financement

Plus d’un quart de la documentation de QGIS 3.4 reste encore à traduire. La réunion des utilisateurs fut l’occasion de lancer un appel !

« Même insuffisants, on a des financements pour des campagnes de correction de bugs, mais il faut choisir ceux qui sont les plus importants, car on ne peut pas tout traiter » remarque Hugo Mercier. Au cours des projets développés pour leurs clients, les développeurs ne prennent pas toujours le temps de corriger les petits bugs qu’ils rencontrent, si ces derniers ne sont pas bloquants. Faudrait-il trouver un mécanisme pour rémunérer a posteriori le temps passé à corriger des bugs ?

« Chez nous, toutes les heures non consommées dans le cadre des contrats de support sont reversées pour le développement et la correction de bugs de QGIS » explique Marco Bernasocchi, à la tête d’Opengis en Suisse.

L’heure est manifestement aux solutions originales et à l’invention pour pérenniser les financements des logiciels libres, dont QGIS est un bon exemple. Mais « l’enjeu est avant tout culturel et réglementaire » comme a tenu à le rappeler Hugo Mercier. Au-delà des injonctions officielles à faire appel à des solutions open source, il faut donner aux utilisateurs, notamment publics, les « moyens » de financer leurs outils.

 

Pour aller plus loin :

– SIG open source : la dynamique QGIS, retour sur la conférence utilisateurs 2018

 

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