Quand les profilers de l’immobilier se nourrissent d’information géographique
Catégorie: Données, Entreprises, Géomarketing, Grand public, Logiciels, Marché, Reportages, WebMapping
par Sukran Dal
845 mots, temps de lecture : environ 3 mn
L’information géographique enrichit enfin le secteur de l’immobilier. Géocodage, points d’intérêt (POI), indicateurs statistiques, avis des habitants sur leur quartier… des entreprises comme KelQuartier et CityScan proposent une nouvelle approche, qui fournit aux particuliers et aux professionnels des visions à la fois détaillées et synthétiques de l’environnement des biens immobiliers. Comment ces entreprises ont-elles construit leur offre ?
« Les contours de communes se monnayaient cent vingt mille euros au début des années 2000 », se rappelle Eduardo Larrain, co-fondateur de KelQuartier, qui faisait alors des missions d’analyse d’implantation pour de grands clients privés. Lorsqu’il découvre la mine d’or de l’open data, il s’y plonge et décide d’assembler ces données pour les fournir gratuitement au grand public. KelQuartier naît en 2010, qu’il complète en 2015 par KelFoncier.
C’est en 2008 qu’Édouard Le Goff fonde Kinaxia à Sophia-Antipolis sur l’analyse de risques. Après s’être imposée sur la fourniture de documents d’urbanisme dématérialisés, l’entreprise a lancé en 2017 CityScan. Désormais, ce sont quatre-vingt-dix indicateurs qui sont évalués pour qualifier l’environnement d’une adresse.
Producteurs de données et d’indicateurs
KelQuartier, comme son nom l’indique, s’appuie sur l’unité géographique du quartier. Le service géocode, assemble des POI, interpole des dizaines de sources de données pour les projeter sur des découpages plus ou moins officiels. Il suffit alors de taper une adresse pour découvrir son environnement. Après avoir fait la promotion de l’approche via un site grand public gratuit, l’entreprise se tourne désormais vers les professionnels (agences immobilières, promoteurs) auxquels elle propose des abonnements, complétés éventuellement par des estimations immobilières.
Un service d’aide à la décision
De son côté, CityScan calcule un score allant de A à E et une couleur définissant le niveau de risque à l’adresse postale. Les indicateurs sont regroupés en dix thématiques, agrémentés de diverses cartes. En janvier 2018, de nouvelles thématiques viendront enrichir les scores : le parc immobilier, la sécurité, l’emploi (dynamiques économiques), les valeurs vertes (composées de l’énergie durable, les déchets, les transports propres) et l’avis du citoyen. « Nous allons mettre en ligne la documentation précise des indicateurs », promet Édouard Le Goff. Les indicateurs sont proposés en freemium aux particuliers et professionnels avec, en version premium, une précision plus élevée et des cartes interactives. Très prochainement, il sera possible de naviguer sur une carte globale contenant l’ensemble des indicateurs. Un widget est également disponible pour les sites des professionnels.
Les nouvelles dimensions de la recherche immobilière
CityScan s’appuie sur les technologies du Big Data pour assurer un service « en temps réel ». « Nous utilisons la BDTopo, OSM avec des données INSEE, SIRENE inclus. L’association QGIS, FME, Python et GDAL permet de modéliser les données et faire les pré-calculs. Côté web, nous utilisons PostgreSQL et PostGis, Geoserver et les tuiles d’OpenLayers. Cependant, pour assurer les requêtages nous sommes en train d’intégrer nos données sous Cassandra. MongoDB facilitera les calculs à la volée, pour les isochrones à pied par exemple », s’enthousiasme Gabriel Vatin, responsable du pôle data. Depuis le lancement du service en mai dernier, 75 000 expertises ont été réalisées sur la plateforme. Plusieurs programmes de R&D sont lancés comme l’interprétation des données du satellite Sentinel pour la cartographie de la pollution de l’air avec l’IMREDD et l’INRIA.
« L’INSEE des quartiers »
Deux millions de POI, cinquante-cinq mille quartiers, cent millions de parcelles… Point de big data malgré le brassage de millions de données chez KelQuartier, qui s’appuie sur une base MySQL. Le principal problème, ce sont les sources de données et leur qualité. Aujourd’hui, le service s’appuie sur des données produites par plusieurs centaines de collectivités, services de l’État et entreprises : « Nous replaçons trois quarts des médecins à la main. L’espérance de vie d’une information géographique est de six mois. Chaque jour, quinze communes modifient leur PLU. Nous tenons nos données à jour automatiquement et manuellement. Nous prenons également des photos des quartiers. De plus, certaines données ne sont pas ouvertes comme les données métier, d’autres sont difficilement accessibles comme les agressions, voire inexistantes comme les futures stations de métro et tramways ou les centres commerciaux pour lesquels nous sommes les seuls à avoir les POI exhaustifs sur toutes les catégories. OSM n’a que 10 % des POI pour les supérettes », complète Eduardo Larrain.
En termes de fonds de carte, l’entreprise est agnostique et se plie aux désirs de ses clients professionnels : Google Map, Mappy, Bing, OSM ou MapBox. « Nous construisons une véritable “usine de digitalisation” avec quarante géomaticiens, urbanistes et cartographes » détaille Eduardo Lorrain. Mais Kelquartier va plus loin que l’assemblage de données « officielles ». Le service parcourt les sites web d’information locale pour exploiter les avis positifs ou négatifs afin de diviser ou de consolider les limites d’un quartier.
« Nous servons six mille acteurs immobiliers répartis sur plusieurs segments, les portails d’annonces comme LogicImmo, les réseaux d’agences immobilières comme Orpi, les promoteurs immobiliers comme Bouygues Immobilier ou Nexity. KelFoncier n’a pas de concurrent, estime Eduardo Larrain. Le marché n’existe pas encore. Mais nous recrutons ! Urbanistes, développeurs, commercial. »