Chroniques d’un GEOINT au goût de COVID :
Épisode 1
Catégorie: A l'actu, Données, Entreprises, Imagerie, Institutions, Marché, Matériel/GPS, Satellite/Spatial, Sécurité/défense
La chronique GEOINT de Thierry Rousselin, TMCftn
Dans la pagaille ambiante, le petit monde de l’intelligence géospatiale, alias GEOINT, ne pouvait pas rester à l’écart. Faisons le tour des acteurs … et de leurs actions. Et puisque tout est parti de là, comment ça se passe au pays du pangolin rieur ?
Lancements en série
D’abord au niveau du lancement de nouvelles capacités spatiales d’observation et de localisation, la décision chinoise de mettre le spatial dans les activités protégées se vérifie : Sur le premier trimestre 2020 (moment clé de la pandémie en Chine), il y a eu plus de lancements de satellites d’observation qu’au premier trimestre 2019. Après un ralentissement en avril et mai, c’est reparti depuis fin mai. On peut toutefois noter que dans cette période, les lancements institutionnels (Gaofen, Yaogan, Jilin, HY-1) étaient prioritaires sur les initiatives privées ou issues des provinces, qui n’ont connu que peu de lancements et pour lesquels les rumeurs de consolidation (regroupements ou abandons de projets) vont bon train. La période a également permis la fin du déploiement de la 3e phase de la constellation Beidou (service de géolocalisation) qui compte désormais 27 satellites MEO (orbite à 21 500 km comme GPS ou Galileo), 5 satellites IGSO (géostationnaires sur des orbites inclinées) et 3 satellites GEO (géostationnaires sur orbite équatoriale). Et la dimension « Route de la Soie » ne faiblit pas avec la montée en puissance de Satellite Herd, opérateur d’un futur réseau mondial de stations sol, qui a réussi sa levée de fond ce printemps.
L’analyse de la progression des données disponibles dans les catalogues (images acquises pendant la période) de SpaceWill (satellites Superview) et CGSTL (satellites Jilin), ne montre aucun ralentissement, elle non plus, ni sur la Chine, ni sur les pays impliqués dans les routes de la Soie.
L’écosystème de l’analyse se structure
À quoi ces images ont-elles servi ? C’est là que les évolutions sont les plus sensibles. La crise a été l’occasion d’une accélération des projets chinois de capacités d’analyse, à plusieurs niveaux. Des équivalents locaux d’Orbital Insight ou de Space Know apparaissent, financés et pilotés par des banques ou des investisseurs. Ainsi, CMB Wealth Management, filiale de la China Merchants Bank, publie depuis le 13 mars un indice de reprise économique (Night Light Industrial Resumption Index), basé sur l’analyse quotidienne des données nocturnes acquises par Jilin et par un satellite US de la NOAA. We Bank propose des services d’analyse dans le cadre du projet Moonshot, incluant le China Economic Recovery Index (CERI), calculé grâce à une combinaison de données Sentinel et de capteurs chinois. Apparaissent également de nouveaux acteurs : En juin, Huawei a signé un accord avec CGSTL pour optimiser l’usage des images Jilin dans ses services. Huawei n’ayant plus accès à Android et à Google Maps, on imagine aisément les ambitions.
Des évolutions plus souterraines sont en cours. Les grands acteurs chinois de la surveillance terrestre par combinaison de drones et d’intelligence artificielle liée au « crédit social » (historiquement liés aux ministères de l’intérieur et de la sécurité publique) semblent se rapprocher des acteurs du spatial. Dans ce contexte il faudra suivre les activités futures de Mining Lamp (le « Palantir » chinois, qui a levé 300 millions de $ en pleine crise auprès d’investisseurs singapouriens et chinois) ou de Hanwang.