La géomatique et ses nombreux métiers
Catégorie: Entreprises, Formation, Institutions, Recherche, Reportages, Utilisateurs
Géomaticien, métier d’avenir ? Sans doute. Mais la proposition d’Arnaud Montebourg de 2013 mérite d’être déclinée au pluriel. Car les thématiques et les compétences mobilisées par les géomaticiens sont très variées. De plus, elles évoluent en permanence. D’où l’importance des liens entre opérationnels, chercheurs et enseignants.
« La géomatique est un objet multiple qui modifie nos métiers » avoue Gilles Trystram, directeur général d’AgroParisTech, en préambule du colloque organisé par le pôle formation et recherche de l’Afigéo le 9 décembre dernier. Premier constat : il faut plus qu’une fiche APEC pour cerner ce que sont les géomaticiens et faire reconnaître l’existence d’une véritable filière.
Pourquoi tant de métiers ?
C’est que la géomatique est une sorte de poste frontière, où se croisent différentes techniques (de la mesure, de l’informatique, de la statistique, de la cartographie…) et de nombreux corps disciplinaires : de la santé à la logistique, de l’urbanisme aux transports, de la banque aux espaces naturels, etc. C’est aussi que la géomatique se pratique désormais avec des moyens très variés : elle oblige certains à être « géomaticiens à tout faire » tandis que d’autres auront des feuilles de mission bien cadrées, si tant est que l’organisme qui les emploie a pris conscience de ces profils particuliers. Une opération qui peut prendre une petite vingtaine d’années, comme le remarque Bruno Iratchet, consultant chez Realia en mission à l’Office national des forêts. C’est enfin que ses socles techniques ne cessent d’évoluer. Cela libère les professionnels de certaines contraintes (plus besoin d’être un cador en géodésie, à l’heure des GPS) mais leur demande de nouveaux savoir-faire : en 2016, un bon géomaticien doit parler couramment big data et 3D.
Mouvement perpétuel
Dans le secteur public, le contexte règlementaire fluctuant impose lui aussi la maîtrise de nouvelles compétences. INSPIRE ? « Il faut savoir mettre en œuvre une normalisation de données, des services de diffusion, piloter un projet de mise en conformité avec la loi, animer des partenariats externes et internes, assurer la protection juridique des données… » liste Séverine Ballereau, responsable géomatique à la métropole Rouen Normandie et membre du groupe SIG/Topo de l’AITF. Les lois MAPTAM et NOTRe apportent, elles aussi, leur lot de problématiques de mutualisation, de diffusion (open data notamment) et de nouveaux métiers : gestion des routes, du cycle de l’eau, des plans climat air/énergie par exemple. Quant aux obligations liées aux travaux sur les réseaux sensibles (décret DT/DICT), « elles nous obligent à comprendre ce que sont les réseaux : leur nature, comment les détecter, leur degré de sensibilité. Cette question nous rapproche également de la topographie à travers la notion de précision » ajoute la géomaticienne.
Une question individuelle et collective
Alors, comment rester « dans le vent » ? Malheureusement, les géomaticiens utilisent peu les dispositifs et les fonds alloués à la formation continue, comme le révèle l’enquête menée par Jean-Christophe Chamayou, consultant chez Lafayette associés. Espérons que le travail mené par CINOV-IT pour que soit créé un certificat de qualification professionnelle permettra à certains de faire reconnaître leurs compétences et saura accompagner la reconnaissance progressive de la filière.
La réponse vient également d’un lien renforcé entre recherche, formation et utilisateurs. Le colloque a permis de découvrir de nombreuses initiatives. Il y a bien sûr les différentes enquêtes qui ont été menées par l’Afigeo, GeoRezo et des membres du GDR MAGIS, qui anime la communauté des chercheurs en lien avec la géomatique. Il y a également la présence d’utilisateurs dans les conseils d’orientation et d’administration de nombreux cycles de formation.
Mais la recherche ne doit pas être oubliée. Pierre Maurel a ainsi détaillé tout l’intérêt de plusieurs années de collaboration entre le laboratoire Tetis (IRSTEA Montpellier) et le syndicat mixte du bassin de Thau. Matthieu Noucher du laboratoire ADESS a expliqué comment l’étude des usages de la géomatique ne peut se faire sans « terrains » d’expériences opérationnels. Quant à Mathieu Becker, fondateur d’Isogéo, il a montré toute l’importance d’une véritable stratégie de recherche et développement, même à l’échelle d’une PME d’une dizaine de personnes.
- AITF : association des ingénieurs territoriaux de France
- Loi MAPTAM : loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles de janvier 2014
- Loi NOTRe : loi portant nouvelle organisation territoriale de la République d’août 2015
- Pour accéder directement aux présentations du colloque « Métiers et compétences en géomatique : de la recherche à la formation professionnelle » du 9 décembre 2015, suivez ce lien