Questions de fond
Catégorie: Cartographie, Données, Dossier : Élections, les candidats se plient en cartes, Open Data, Utilisateurs
En matière de cartographie des élections, le fond de carte est essentiel. L’unité de base est le bureau de vote. Mais ceux-ci ne cessent de changer, élection après élection. Malgré la poussée de l’open data, aucune base nationale n’est encore disponible.
Chaque année précédant une année électorale, c’est le même bazar : les municipalités doivent mettre à jour les périmètres de leurs bureaux de vote, afin de prendre en compte l’évolution de la population et rester autour de mille électeurs par bureau, comme le recommande la Loi. Bien sûr, les soixante-sept mille bureaux de vote ne sont pas concernés. Seules quelques centaines de grandes communes doivent revoir une partie des découpages. Mais la gestion du dossier est à la mesure de la diversité des moyens des collectivités.
Bons élèves
À Rennes par exemple, une application exploitant ArcGIS Desktop aide le service élection à préparer son découpage pour 2017. L’évolution de la population implique d’éclater certains bureaux de vote, ce qui doit être réalisé avec doigté car le sujet devient vite sensible, les électeurs, ici comme ailleurs, n’ayant pas envie de changer de bureau tous les ans. Les listes électorales sont importées depuis le logiciel de gestion Logitud Suffrage. Après avoir été géocodés, les électeurs sont regroupés manuellement. Une fois qu’un scénario a été choisi, chaque électeur se voit attribuer un numéro de bureau et la nouvelle couche des périmètres réintègre le SIG, tandis que l’arrêté préfectoral est rédigé, validé et publié. La couche des périmètres vient enrichir le site Internet, l’intranet et l’extranet. Elle est également diffusée en open data. À Lyon, le service SIG se charge de recomposer chaque année la nouvelle couche des bureaux de vote, sur la base des indications fournies par le service des élections. « C’est un travail qui reste assez artisanal car c’est de la dentelle » rappelle Paul le Corre, responsable SIG de la ville de Lyon. Si seuls quelques arrondissements changent, il faut ici tenir compte du relief et autres éléments structurants de la ville. Là encore, la couche est publiée en open data et vient alimenter un site grand public.
Tentatives de bases nationales
Malheureusement, toutes les municipalités ne publient pas régulièrement les périmètres de leurs bureaux de vote et celles qui le font s’appuient sur des référentiels variés, ce qui rend toute consolidation à l’échelle nationale impossible. En l’absence de fond officiel national des bureaux de vote, c’est la débrouille qui règne pour les entreprises du secteur : récupération des données en open data et auprès des services élection, calcul de polygones par regroupement de paquets d’électeurs à l’adresse, report manuel des contours décrits dans les PDF des arrêtés préfectoraux.
En 2009, les chercheurs impliqués dans le projet ANR CARTELEC, se sont donnés pour mission de développer une base de données cartographique pour analyser les comportements électoraux à l’échelle des bureaux de vote. Financé jusqu’en 2013, le projet a permis de constituer une base de données consolidée des bureaux de vote sur plusieurs années (2012, 2014, 2015) mais limitée aux villes de plus de cent mille habitants. Malgré l’absence de financements, certains laboratoires continuent à faire évoluer cette précieuse ressource, avec les moyens du bord : récupération de fichiers là où ils existent, numérisation ailleurs.
Car les arrêtés préfectoraux sont diffusés sous forme de PDF indiquant des listes de rues (éventuellement avec les numéros concernés), le numéro et nom du bureau, le lieu de vote et l’arrondissement associé. Ainsi, alors même que cartes et SIG ont été mobilisés pour réaliser les découpages, ce sont des documents alphanumériques peu exploitables qui sont diffusés à l’échelle nationale.
La situation va-t-elle s’arranger rapidement ? Le ministère de l’Intérieur, la préfecture du Val-de-Marne et Etalab viennent d’organiser, le 5 novembre dernier, un Open Data Camp « cadastre électoral » dans le cadre de la préparation du Sommet mondial du partenariat pour un gouvernement ouvert. En effet, maintenant que le ministère de l’Intérieur publie les résultats des élections à l’échelle du bureau de vote (depuis septembre 2015), il est ironique de ne pas pouvoir les représenter. Les participants étaient invités à réfléchir à la meilleure manière de réaliser un fond cartographique national exploitant les arrêtés préfectoraux, les listes électorales anonymisées ainsi que les API de géocodage de la BAN. Présentation des résultats lors du sommet du 7 au 9 décembre 2016. À suivre de près.